le goût du risque, l'envie de rencontrer du monde, le besoin de se montrer, là étaient certaines des innombrables raisons qui avaient poussé la demoiselle à s'inscrire à l’événement. entre les affiches placardées dans l’entièreté du campus, les publicités sur internet ou même le bouche à oreille, il ne lui avait pas fallu longtemps pour réfléchir avant d'inscrire son nom sur la liste, là, à trôner parmi les dizaines de patronymes de célibataires, hara droguée à la nécessité de découvrir si les promesses allaient être tenues. l'étudiante n'avait pas spécialement envie de se lancer dans une nouvelle relation, elle qui ne comprenait pas toujours la nature des sentiments qui naissaient parfois au creux de son palpitant, et qui privilégiait un peu trop souvent le désir sur le véritable amour. les longues idylles n'avaient jamais marché pour elle, et elle s'était rapidement faite à l'idée qu'il valait mieux détruire ses relations, plutôt qu'à les subir jusqu'à être lâchée – c'était toujours ce qui arrivait -. alors elle s'était rendue jusqu'aux lieux communiqués sur le petit carton parfumé, sans grands espoirs de trouver son âme-sœur (d'ailleurs, elle n'aimait pas spécialement la saint-valentin), hara plutôt intriguée par ce qu'on leur avait réservé à elle et à son futur partenaire, yh, lettres de l'inconnu lues sur le papier décoré. la coréenne avait aimé l'audace du point de rendez-vous, le parc aquatique, et la tenue vestimentaire imposée, le maillot de bain. piscine privatisée pour l'occasion, le long de laquelle elle déambulait lentement, portant son regard au loin vers la silhouette masculine qu'elle ne connaissait pas, hara dirigée par deux angelots à l'allure hospitalière. c.y.h, c'est ça ? salut, je m'appelle hara. qu'elle lança, brisant le silence. je m'attendais à un dîner cliché aux chandelles, je suis surprise. la belle s'asseyait sur une chaise haute et regardait le contenu des verres, l'un d'eux déjà un peu écoulé. bien désaltéré ? j'espère qu'ils sont bons au moins. pris la main dans le sac.

yonghwa, sympa d'enfin pouvoir mettre un nom sur des initiales. hara n'avait pas eu envie de potentiellement passer la journée avec une personne qu'elle connaissait, et aurait probablement fait demi-tour si une silhouette familière s'était dévoilée à elle à la place de yonghwa, hara craignant l'ennui, voulant à tout prix l'éviter. parler à un inconnu était définitivement plus entraînant. moi non plus, du moins, pas au premier rendez-vous. si elle n'appréciait pas la saint-valentin, et était partisane du 'c'est une fête purement commerciale', hara ne pouvait s'empêcher de trouver un soupçon de romantisme et d'élégance à un dîner aux chandelles (la gamine n'y était tout simplement pas insensible, même si elle laissait présager le contraire). c'était un bon cliché, elle devait l'admettre.

hara daignait enfin poser un instant son regard sur son interlocuteur, l'inspectant minutieusement, lui et sa gêne (qu'elle ne pensait pas réellement plausible, yonghwa qui semblait plus sûr de lui que ce qu'il laissait potentiellement prétendre). dans un sens, ce que le garçon venait de mentionner la rassurait, loin d'elle l'idée de se retrouver ivre avant d'aller nager dans la piscine, la demoiselle n'avait pas l'intention de se noyer, ni même de s’embarrasser devant son compagnon de journée. je sais pas... c'est pas très gentleman de commencer son cocktail sans attendre l'invitée de marque. elle lui offrît un sourire avant de finir par accepter le verre qu'il lui tendait, quelques secondes plus tard. hara disait difficilement non à ce qu'on lui offrait. mais bon, j'ai soif alors, trinquons... à cette journée, en espérant qu'elle ne soit pas aussi ridicule que ce que j'imagine. sarcasme sciemment provoqué, tandis que les flûtes s'entrechoquaient entre elles. alors yonghwa. parle-moi un peu de toi... pourquoi tu t'es inscrit ? tu voulais rencontrer ton âme-sœur ? c'est ce qui était écrit sur les milliers de flyers éparpillés un peu partout dans la capitale, la promesse de rencontrer son soulmate, ou de renforcer un lien amoureux déjà présent... hara mordait difficilement à l’hameçon, ne croyant pas à l'amour au premier regard, ou à ce concept d'âme-soeur qui ne lui évoquait rien de bon.

j'y compte bien. peut-être même plusieurs, l'affront est terrible. qu'elle lançait en fronçant vainement les sourcils, mine d'être en colère, ou choquée. la fierté n'était pas ébranlée, bien au contraire. hara n'était pas du genre à excuser facilement les autres pour les mauvais gestes qu'ils commettaient. l'erreur (même si elle prenait plutôt son attitude pour de l'audace, chose qui ne lui déplaisait, finalement, pas vraiment) de yonghwa était faite, elle ne souhaitait plus en parler, même si elle n'oublierait pas de sitôt qu'il lui devait quelque chose pour se faire pardonner. l'étudiante portait le bout de la paille entre ses lippes vermeilles, goûtant au breuvage inconnu à l'aspect azuré. hara avait appris à faire attention, n'acceptait jamais les cocktails qui n'étaient pas faits devant elle ou offerts par des gens qu'elle ne connaissait pas, gamine qui se méfiait de tout ce qui se passait autour de sa propre personne, effrayée à l'idée qu'on verse dans ses verres des substances dangereuses. mais aujourd'hui, la belle s'était laissée tenter plus facilement, yonghwa ayant déjà bu quelques gorgées. quitte à ce qu'il lui arrive quelque chose aujourd'hui, elle préférait que ça arrive sur la terre ferme, plutôt que dans l'eau (piètre nageuse). je vois... ça nous fait un point commun dans ce cas. elle acquiesçait de la tête à la réponse de son interlocuteur. hara n'avait pas besoin de blind date pour rencontrer de nouveaux garçons dans son existence, elle y arrivait très bien toute seule, elle et son aura mi-mystérieuse, mi-avenante. hara, elle avait surtout eu envie de découvrir le concept, connaître ce petit frisson de partir en rendez-vous avec une personne qu'elle n'avait jamais vue. en trois mots, italie, arts et... disquaire. c'est très long et passionnant à raconter, je serai ravie de tout t'expliquer, si tu te comportes bien le reste de la journée. non, peut-être que l'affront commis par yonghwa quelques minutes avant qu'elle arrive n'était pas oublié, finalement. et dans un sourire en coin, elle portait une nouvelle fois la paille de son cocktail à ses lèvres. j'ai envie d'aller dans l'eau. tu viens ? qu'hara adressa au garçon, en dénouant la serviette qu'elle avait accroché autour de sa taille.  

t'as commis un premier délit avant même que j'arrive... il va falloir que tu te rattrapes. elle a envie de croire en lui, et de s'autoriser à penser qu'il n'est pas là uniquement pour la draguer. je raconte rarement ma vie au premier venu, même si ses intentions ne sont pas mauvaises. que hara siffle entre ses lèvres, alors qu'elle pose soigneusement la serviette sur sa chaise. elle s'en va ailleurs, regard posé derrière elle. hara suit ses propres indications, mène le chemin alors qu'elle arrive devant la piscine creusée, eau venant lui chatouiller les pieds. hara repense subtilement à ce qu'elle lui à dit, à yonghwa. nouveau mensonge ajouté à son compteur. si elle laisse entrevoir des prémices d'une vie parfaite à quiconque l'approche, la vérité est tristement moins jolie à entendre. hara n'aime pas l'existence morose qui semble continuellement lui coller à la peau. depuis qu'elle est adolescente tout file de travers, ne trouvant de réconfort qu'au milieu cercle restreint de personnes qu'elle laisse approcher sans animosité. elle n'a pas envie d'étaler les détails de son quotidien... déni qu'elle s'efforce de dissimuler, sentiment qu'elle n'est pas prête pour parler. à quiconque. saut du garçon qui la tire de ses pensées embrumées. vraiment ? le sourcil s'arque malicieusement, alors qu'elle se décide enfin à plonger l’entièreté de sa silhouette dans les abysses azurées, laissant son visage et ses épaules à la surface. tu peux toujours essayer. mais tu n'auras probablement pas de réponse. mine pleine d’effronterie, son sourire revient alors qu'elle l'observe nager, facilités évidentes de yonghwa dans l'eau.

elle ne parvient nullement à retenir le rire qui s'échappe d'entre ses lèvres. hara a toujours envie qu'on l'écoute, qu'on suivre ses indications, mais ça lui semble... trop facile. je veux savoir si t'es un garçon honnête. je suis sûre et certaine que t'es pas uniquement là parce que t'es simplement curieux, je me trompe ? paroles du garçon qui résonnent encore, alors qu'elle essaye de le déchiffrer soigneusement. elle a rencontré toutes sortes de types dans son existence, des individus qu'elle aurait aimé ne jamais connaître, des hommes frustrés, des briseurs de cœur... demoiselle se méfie de tout le monde à présent, préfère demeurer de glace, éternellement froide, plutôt que de montrer qu'elle est accessible, voire même, en besoin de réconfort (déni perpétuel). ce n'est pas un défi. vois ça comme du bon sens. ou du respect. respecte mes souhaits, et je te respecterai aussi. il nage vers elle, hara laisse faire, tant qu'il ne dépasse pas la limite imaginée dans son esprit. l'eau apaise son esprit, détente éphémère. et elle commence à se dire que la conversation serait sans doute beaucoup moins intéressante, si elle ne parlait pas de sa propre personne. changement d'avis soudain, alors qu'elle se déplace doucement pour s'éloigner un instant de lui. hara qui vogue à un autre endroit de la piscine, silhouette masculine désormais dans son dos. désolée de possiblement te décevoir mais je suis intégralement coréenne. j'ai vécu à naples pendant mon adolescence... satisfait ? fraîcheur vient chatouiller ses épaules désormais mouillées, alors qu'elle s'enfonce un peu plus dans la voûte azurée tout en se retournant pour l'observer une nouvelle fois, yonghwa toujours à sa place. vérité lancée à son interlocuteur, souvenirs indélébiles figés dans le temps, mais qui semblent pourtant si lointains.

si j'ai bien appris une chose avec les mecs, ce que vous en avez toujours, des arrière-pensées. j'ai tort ? s'il lui dit le contraire, elle ne le croira pas. amours tourmentés qui hantent encore les pensées de hara, à croire que chaque homme est né dans le même et éternelle catégorie : ils sont tous mauvais. elle le sait, que tous ces êtres sont les mêmes, et malgré ses propres préjugés, elle se trouve encore incapable de s'en détacher. pourtant, qu'elle aimerait, au fond de son palpitant, qu'on lui prouve le contraire. mais tous on jusqu'à maintenant, lamentablement échoué.

hara et le concept de l'amour érigé avec le temps : l'affection blesse. elle aime. elle aime puis laisse subtilement les sentiments s'envoler au bout d'un moment, à préférer broyer des cœurs plutôt qu'on abîme le sien, déjà trop peiné. peur ? non. elle sourit. hara qui ne pense pas que le flot de questions personnelles la submergerait peu à peu, pas encore prête à parler d'elle à yonghwa, ou à qui que ce soit d'autre. j'avais juste envie de rencontrer une nouvelle personne. on peut passer à autre chose ? ou peut-être qu'elle a besoin qu'on lui confirme, que depuis tout ce temps, elle peut, faire confiance.