c'est un regard alarmant qui illumine ses iris lorsqu'il le voit s'avancer dans l'église. yeonghwan, c'est le prénom qu'il entend, celui qu'il ne reconnait pas, preuve qu'on ne l'a pas oublié, que son passé le rattrape plus rapidement qu'il peut l'accepter. de sa lâcheté, il refuse de se faire découvrir, gamin caché dans le recoin sombre de la bâtisse, le coeur cognant contre son torse. il appréhende trop le moment où il devra lui faire face, comme la première fois qu'il s'est révélé à lui. s'en est trop pour lui, eden qui ne s'est pas encore remis de l'ébranlement que cet inconnu lui a causé. ça revient toujours à ce collier qu'il reconnait clairement, même s'il ne peut le replacer. frustration d'y voir qu'il a raison, qu'il est quelqu'un qu'il devrait reconnaître, alors qu'il ne parvient pas à mettre un nom à ce faciès. frustration contre lui-même, de ne pas comprendre, de ne pas parvenir à se rappeler de sa vie antérieure, de ne pas se reconnaître dans le miroir, alors que d'autres le peuvent. d'un côté, il veut fuir, mais de l'autre côté, il veut en apprendre plus sur qui il est. si seulement sa peur ne prenait pas le dessus, peut-être qu'eden aurait pu s'avancer et l'aborder. mais au contraire, il le fuit. le coeur au bord des lèvres à l'idée qu'il le voit, il cherche une solution. à paniquer, se mouvant d'un côté de l'église à l'autre, à quelques pas de l'extérieur, il en vient à laisser tomber son refus d'appeler à l'aide, rien que pour une fois. il n'a pas le choix. quitte à se sentir humilié, à avoir l'impression d'être tombé plus bas que bas, il prend son téléphone à l'écran brisé d'une main tremblante pour envoyer un message à la seule personne qui lui vient à l'esprit ( nayoung ). il ignore celui qui le cherche, ignore la voix qui résonne dans l'air et se jette sur la porte en priant qu'on ne l'aille pas entendu, ni vu. craintif de devoir affronter celui qui le cherche, le souffle presqu'à bout, il tourne, eden. d'un côté à l'autre, à chaque son résonnant au creux de ses oreilles qui lui fait penser qu'il s'est décidé de le chercher dehors, là où il est à présent. c'est possible que ça ne soit que son affolement qui lui fait penser qu'on passera à l'extérieur d'une minute à l'autre, mais il se persuade du contraire, eden. impossible d'attendre, sous son agitation, il se cache là où on ne pensera pas à le chercher : un buisson. gamin qui attend, chaque seconde augmentant son angoisse à l'idée qu'on sorte enfin de l'église pour le chercher ailleurs ( ça n'abandonne pas ? ), jetant un coup d'oeil d'un côté à l'autre avant de se décider à changer d'endroit. s'éloigner de ces portes, en priant d'avoir le temps de se cacher hors de vue, sans courir avec sa cheville foulée. du buisson jusqu'à la rue, il tombe entre deux voitures, les battements de son coeur martelant sa tempe. enfin, qu'il s'écrie presque, la voiture de nayoung est reconnue de loin. il se lève pour être vu, tenant entre ses mains cramponnées son portable pour lui indiqué où il se trouve. ( entre deux voitures. ) au même moment où elle arrive devant lui, la porte de l'église s'ouvre et eden se jette sur la poignée, ignore ce prénom qu'il résonne à travers la distance et claque la portière. bordel, qu'il souffle, avant de se tourner la tête pour observer celui qui l'appelait, d'un sentiment coupable qui le tient sur place. il ne dit rien, eden. silence de sa part qui traîne, de cet affront dont il n'a jamais voulu avoir. l'appel à l'aide qui le met dans une situation particulière, l'une qu'il s'est toujours refusé de faire. merci de m'avoir recueilli, qu'il souffle. c'est plus facile de fausser une attitude en ligne que face à face, il n'a jamais été un grand acteur, eden. c'est difficile de feindre que la situation ne l'ébranle pas.

le paysage défilait à une vitesse incommensurable, par bribes, flou s'esquissant devant et sur les côtés de la route, tant la voiture dépassait les limites autorisées. tout voguait bien trop rapidement, ribambelle de couleurs indéfinissables ployant derrière le pare-brise. pourtant, la conductrice ne voyait, ne transpirait, ne vivait que pour un seul ton en ces instants particuliers, le rouge. sur son visage, la terrible expression de la colère, de l’inquiétude, qu'elle ne parvenait à dissimuler tant les sentiments se mélangeaient en elle. il avait fallu quelques simples messages pour que sa bonne humeur se transforme en émoi, qu'elle haïssait au plus profond de son âme : une personne qu'elle aimait en danger, et elle, désemparée, ne pouvant rien faire d'autre que de rejoindre l'âme en peine, priant silencieusement pour qu'il ne se soit rien passé d'abominable en son absence. elle avait la sale manie de s'inquiéter pour les gens qu'elle appréciait un peu trop. nayoung ne le montrait jamais et pourtant, veillait constamment de loin. et ça la touchait de savoir qu'elle avait été la première prévenue, mais l'agacement l'accompagnait, parce qu'elle se savait impuissante, jusqu'à maintenant. si la police avait été sur son chemin, elle se serait sans doute fait confisquer sa voiture, seulement pour eden et sa protection, elle était prête à enfreindre un bon nombre de règles, rien que pour l'unique satisfaction de savoir qu'il allait bien.

le clocher de l'église ployait lentement et elle pouvait enfin se permettre de reprendre son souffle. dernier texto reçu à la volée, laissant à nayoung la confirmation qu'elle avait été vue, voiture dérapant jusqu'au parking du lieu sacré (miracle déguisé), et eden courrait à sa rencontre. it's britney bitch. humour douteux. monte et magne-toi ! vitre ouverte pour lui crier de se dépêcher. en un instant, il était assis sur le siège passager et elle redémarrait à vive allure, les pneus de sa vieille bagnole crissant sous les graviers et le sable. il n'avait fallu que quelques secondes, un battement de cils, pour que la voiture s'éloigne dans un nuage de fumée. le pied sur l'accélérateur, elle roulait en direction d'une supérette qu'elle avait croisé à quelques kilomètres de l'église, suffisamment éloignée pour qu'on ne les suive et retrouve pas. tu m'expliques ? que l'aînée lançait, alors qu'elle fronçait les sourcils. tout de suite. le ton était sec, presque comme un ordre. elle détestait qu'on lui fasse peur, particulièrement quand ses proches étaient concernés. les yeux rivés devant elle, nayoung semblait impassible, alors qu'elle accélérait davantage, énervée, frustrée de ne pas avoir rejoint le garçon plus tôt. et surtout, de l'avoir laissé tout seul aussi longtemps. sinon y'a pas que lui que je vais défoncer eden. elle n'avait pas tout retenu de ce qu'il lui avait transmis par message quand elle était sur le chemin pour venir le chercher, nayoung à l'esprit embrumé. elle avait seulement retenu qu'eden était dans le pétrin, et qu'un homme refusait de le laisser tranquille. en somme, suffisamment de prétextes pour que nayoung fasse demi-tour et aille le menacer à son tour. et je te ramène là-bas en plus de ça.

l'humour de nayoung ne l'affecte pas d'une manière ou d'une autre, il se retrouve enfoncé dans le banc, trop perdu dans ses pensées pour commenter sur ses paroles. il n'a pas eu à se le faire dire deux fois, il a bien voulu échapper à celui qui veut tant lui parler, s'expliquer, il ne sait pas vraiment. le palpitant tambourine contre son torse, l'adrénaline du moment le quitte enfin peu à peu que la voiture s'éloigne du bâtiment où résonne encore le prénom qu'il ne reconnaît pas. et eden baigne dans le silence, alors qu'il réfléchit à la scène qui vient de se dérouler il y a quelques minutes et craint que ça ne sera pas la première ni la dernière fois que ça arrivera. sa peur irrationnelle l'empêche de dormir seinement depuis qu'il est apparu dans sa vie, gamin qui ne peut que se tourner et se retourner dans son lit sans fermer l'oeil. et s'il se glisse à l'intérieur de l'église alors qu'il dort et qu'il essaie encore une fois de lui parler ? s'il est pris, sans façon de s'échapper, il fait quoi, eden ? fuir son passé, fuir sa vie d'avant, c'est exténuant. plus les jours avancent, plus les bribes de sa vie antérieure se force à se révéler et plus ça parsème le doute quant à ce qu'il a pu faire. ses pensées ne sont que confusion et il veut, il exige que ça cesse. il n'a aucun contrôle, eden. il n'y a que sa tête qui le force de plus en plus à faire face à ce qui l'effraie le plus possible, sans lui donner une réponse claire sur ses questions. est-il réellement une personne horrible ou est-ce sa tête qui le torture sans raison ? ses mains sont toujours aggripés autour de son téléphone, le bout de ses doigts nuancé du rouge de son sang qui ne circule plus et il relâche enfin son emprise. il regarde à peine nayoung, l'humiliation se déversant sur sa personne maintenant qu'il n'est plus dans un danger immédiat ( c'est dans sa tête que tout ira mal ), la gorge qui se serre tandis qu'elle lui demande à juste titre des explications sur la situation dans lequel il était. je… je… je ne sais pas, qu'il a envie de souffler. les secrets qu'il ne veut pas révéler, de cette nouveauté dans sa vie. le dire à voix haute, c'est l'admettre que c'est vrai. c'est de reconnaître que ça le rattrape, tout ce qu'il a poussé derrière lui. et il ne veut pas y faire face, eden. il ne veut pas faire face à celui qui porte ce prénom, yeonghwan. c'est rien, le ton de sa voix se brise en cours de chemin, de les lèvres qui se pincent ensembles dans une tentative désespérée de faire taire sa réaction qui le rattrape, de son coeur qui s'alourdit. pardon, qu'il parvient à murmurer. c'était juste… c'était… quelqu'un qui est certain de me reconnaître. qu-qui me connaît. et j'ai paniqué. et il s'arrête sur cette phrase, eden. les yeux embués, sa vision qui vacille, il ne peut que se sentir honteux de poser ses problèmes sur nayoung, qui n'a rien demandé. l'idée même de l'avoir accablé de ses problèmes, maintenant et avant, lui donner l'envie de s'enfoncer dix pieds sous terre jusqu'à ce que le monde entier l'oublie. la faiblesse qu'il exhibe en sa présence, tout le submerge et l'engouffre dans une honte sans fin. pour quelqu'un qui réprime toute émotion et n'a que l'habitude de démontrer de la froideur… il se retrouve soudainement anéanti de ne pas être capable de gérer seul.

obligée à devenir l'aînée et la femme en charge de la maison, devant le père souverain et violent, nayoung avait été forcée à ses dépends de grandir plus vite, et à avoir des réflexion plus matures que les autres gamins de son âge, et ce, depuis bien longtemps. la vérité, qu'elle dissimulait toujours derrière son masque de gamine forte et un peu loufoque, particulièrement devant ses proches, était qu'elle sentait constamment un sentiment d'inquiétude nourrir son palpitant quand l'une des personnes auxquelles elle tenait était dans le pétrin ou n'allait pas bien. elle n'avait pas hésité une seule seconde à l'appel à l'aide d'eden, stoppant les activités qu'elle était en train de faire, pour pouvoir le sortir de la situation compliquée qu'il était en train de vivre. ou du moins, venait d'affronter. et nayoung, elle était dure avec lui, comme elle l'avait souvent été avec ses benjamins, parce qu'elle se sentait concernée par ce qui lui arrivait. la brune ne l'avait jamais pris en pitié eden, mais elle estimait toujours qu'il méritait mieux que tout ce qu'il avait vécu, tout ce qu'il vivait actuellement. alors elle l'accueillait quand elle le pouvait, le forçait parfois à dormir chez elle (elle se doutait que son canapé convertible était plus confortable que les bancs de l'église ou les vieux matelas de la boîte de nuit dans laquelle il travaillait parfois), l'invitait à manger dès que l'occasion se présentait. elle ne pouvait s'en empêcher nayoung, cœur guimauve pour ce garçon qu'elle souhaitait considérer de plus en plus comme un membre de sa famille et qu'elle ne pouvait laisser tomber, devoir d'une aînée à l'encontre d'un frère qui lui importait. ça n'a pas l'air d'être 'rien', eden. et un instant, ses pupilles voguaient de la route, jusqu'à la silhouette de celui qui était désormais assis du côté passager de sa vieille voiture. elle se doutait qu'il ne voulait en parler. ça se lisait sur son visage, eden confus de la situation qui venait de se produire. oh ! qu'elle ne pouvait s'empêcher de rétorquer alors qu'il commençait enfin à se confesser sur ce qu'il lui était arrivé. dans un autre contexte, on aurait pu accueillir la nouvelle avec joie. une personne de son passé venait de ressurgir sous ses yeux, c'était pour lui l'occasion de peut-être, retrouver certains de ses souvenirs perdus, et surtout, sa réelle identité. mais dans le cas d'eden, il n'avait pas eu besoin de lui dire, elle avait deviné toute seule, qu'il était effrayé à l'idée de savoir s'il avait toujours été une bonne personne. ou non. il a été violent avec toi ? d'une quelconque manière ? s'il t'a fait du mal, je vais le chercher et il va regretter eden. menaces lancées en l'air, alors qu'ils continuaient de voguer sur la route, chemin menant à la supérette, qui n'était désormais plus très loin d'eux. t'as appris que t'étais plein aux as finalement ? non nayoung, ce n'était ni le lieu, ni le moment. confusion revenue au galop. hey, je peux pas me mettre à ta place mais je pense que c'est normal de paniquer, tu pouvais pas t'y attendre, et ça a dû te faire un choc... j'ai pas envie de te pousser à tout me dire, mais il y a certaines choses qui te sont revenues ? quitte à lui venir en aide, autant le faire complètement.