Les courbatures commençaient à diminuer, et il se dit qu’il devrait se ménager un peu, entre la danse, le taekwondo et courir de salle en salle, son corps s'était mis en grève la veille, et ça se calmait à peine aujourd’hui. Mais ça ne l’empêchait pas d’aller suivre son seul cours de la journée, mettant à rude épreuve son poignet, mais il n'était pas du genre à abandonner. Parce qu’il avait foi en son avenir, faite juste de musique, loin de tout le reste. Mae Ri, il rêve sa vie, et fait tout pour que ça soit le cas, même si tout peut foirer avant d’avoir commencé. Et enfin, la fin des cours, de la journée, libre comme l’air, jusqu’au soir du moins. Quand il devra aller s'entraîner à l’agence, il pourrait y courir directement, n’ayant pas peur des heures supps, mais l’envie de flâner un peu est présent, alors qu’il prend le métro au hasard, observant autour de lui, les écouteurs aux oreilles, il se perd entre les sons rythmé de musique pop, sans prêter l’oreille au monde réel. Il est dans son monde, et il sort quand il en a envie, les mains dans les poches. Il fait beau aujourd’hui, même s’il ne fait pas particulièrement chaud, il déambule dans les rues, à regarder dans les vitrines des magasins, sans jamais y entrer, le shopping, il n'en a pas vraiment envie aujourd’hui, juste se laisser aller à quelques flâneries, les mains dans les poches.

Finalement, le regard tombe sur un petit café, au air ancien, et il se dit pourquoi pas. Il n’a rien pris depuis ce matin, une boisson fraîche ne ferait pas de mal. Il passe le pas de la porte alors, observant les lieux, enlevant ses écouteurs, l’ambiance semble assez cool ici, et il se dit qu’il reviendra peut-être ici. Il se dirige alors vers le comptoir, où se trouve une serveuse au doux sourire. L’étudiant sourit alors et la salue.

“- Bonjour, mademoiselle, est-ce que je pourrais commander un cappuccino ?”

Il l’observe et il a envie de s’amuser un peu, enfin discuter surtout, juste, s’occuper. Il sort tout de même de quoi payer la commande.

“- Je connaissais pas cet endroit, mais ça fait vintage… Contrairement à vous.”

Non, il ne drague pas, les filles ça ne l’intéresse pas, il veut juste bavarder et observer les réactions.


“- Enfin, il y a quelques livres, y a vraiment des personnes qui passent des heures à lire ici ?”

La jeune femme ne semblait pas gênée de sa présence et de son avis de discuter. Sûrement pas le manque de monde, le café semblait déserté, pour des lieux plus attractifs pendant cette saison. C’était sûr que c’était le moment de profiter de l’air extérieur, du soleil et du temps doux.

“- ça donne un charme, si tout est ancien, ça serait bien triste.”

À vouloir rester dans le thème, il aurait imaginé une vieille dame, dans les habits d'antan, pour un lieu figé dans le temps. Mais il imagine sûrement que le proprio n'est pas contre la modernité, s’il acceptait les jeunes comme employé -parce qu’il doute tout de même qu’elle en soit propriétaire-. Il écoute les explications, accoudé au comptoir, préparant la monnaie alors, acquiesçant doucement aux mots de la serveuse.

“- Je vois, c’est sûr, ça a l’air d’un endroit idéal pour se poser et lire ou réviser.”

Il devrait peut-être venir plus souvent, réviser ses examens, dans le calme, sans être seul avec lui-même. S’il se souvient de l’endroit plus tard. Il n’avoue ne pas avoir fait vraiment attention au chemin pris jusque-là, à déambuler sans but. Mais il fut bien content de voir sa boisson en main, goûtant le breuvage encore chaud, c’était bon. C’était encore un bon point, de plus, son interlocutrice ne fermait pas la conversation.

“- C’est vrai, je me suis arrêté seulement pour boire quelque chose.”

Une envie, juste comme ça, une lubie de l’instant, la curiosité quand son regard est tombé sur la façade, rien de prévu, rien de planifié, se laissant aller à ses pensées du moment.

“- Je ne connaissais pas, je ne savais pas vraiment qu'il y avait ce genre de café, est-ce que ça marche ? Comment ça tourne s'il y a beaucoup de clients qui restent des heures ?”

Le calcul dans la tête, il y a l’air d’avoir pas mal de place, mais une place gardée longtemps pourrait empêcher de faire tourner la clientèle. Curiosité juste comme ça, l’envie de discuter, avec une fille agréable, buvant sa boisson calmement sans précipitation, laissant la chaleur se diffuser lentement dans des doigts qui encercle la tasse.

“- vous êtes étudiante ?”  

Elle semblait jeune, et il se dit que même si l’endroit semblait chaleureux, cela l’étonnerait d’entendre qu’elle voudrait passer sa vie ici, plus le profil d’un boulot temporaire pour payer une vie étudiante. Mae Ri l’observait alors, d’un air enfantin, la demoiselle avait l’air sympathique, assez pour qu’il ne joue pas les idiots.

“- D’ailleurs, je m’appelle Mae Ri, vous pouvez me tutoyer, on doit avoir le même âge, et le vous ça me vieillit un peu”

Il n’avait pas vraiment réalisé, que ses mots pouvaient être mal interprétés. Alors il avait continué aisément, buvant sa boisson tout en posant les questions qui lui viennent en tête, curiosité poussée par l'ennui, lui qui allait passer son après-midi seul, faisait juste durer son passage éphémère en ses lieux pour se divertir. Entre ses doigts, il fait tourner la tasse, jouant avec les ondulations du liquide dans le récipient, pendant que les voix s’élèvent dans la pièce dans une jolie symphonie.

“- Je m’en doute, il fait chaud pour s’enfermer dedans… Enfin, je suis désolé pour vous qui êtes coincé ici du coup.”

Mae Ri, il n’aime pas totalement l’été et ses fortes chaleurs, les sorties possibles et la bonne humeur générale qu’offraient les rayons du soleil. Ça lui rappelle ses longs été où même par une chaleur asphyxiante, le gamin devait garder sur ses épaules le pull légèrement trop grand pour camoufler les traces des troubles d’une famille aux allures ordinaire, mais qui n’était qu’un enfer pour l’enfant vide. Sortant de ses pensées, il sourit pour cacher le trouble, boit une gorgée qui lui brûle la langue, mais elle en reste moins douloureuse que les pensées amer d’une enfance avorter.

“- Je vois, ils sont en vacances pendant que vous bossez ?”

Enfin, il est sûr que trois pour deux clients, ce n'était pas rentable, c’était chiant, hormis le fait de pouvoir bavarder le temps que les clients se font absents.

“- mais je parlais plus au niveau des places à table, en réalité, s’il arrive qu’il n’y ait plus de place libre pour un nouveau client.”

Il insiste peut-être trop, embêter la demoiselle peut être marrant, il reste tout de même gentil dans le fond, elle ne lui est pas désagréable après tout, polie et serviable, peut être juste son taf, mais c’est déjà ça. Il fut content d’avoir bien deviné, un peu stupide devant un fait assez évident, après tout les études ne se payaient pas tout seul, ni la vie en général. Il fit quand même une moue boudeuse au refus du tutoiement alors, une tête enfantine qu’il a appris à imiter, caprice qu’il ne se serait pas permis dans le temps, mais qu’il aime en abuser désormais.

“- Je vois pas d'étrangeté, on est tous les deux étudiants, c’est pas bizarre.”

Il termine son verre dans une surprise à peine dissimulée, il n’a pas vu le liquide diminué, et il est frustré de la fin de boisson, sortant encore quelques wons de son porte-monnaie.

“- Je peux en avoir un autre s’il vous plaît ?”

Un sourire qui se veut mignon, amadouer la demoiselle qui semble sur ses gardes sans raison. Une main passe dans ses cheveux le temps de trois secondes, alors qu’il se redresse un peu.

“- Donc étudiante en droit ? Vous avez des courages, ça a l’air fastidieux…”

Il n’aurait jamais essayé des études aussi fastidieuses, médecin, avocat, il avait l’impression que c’était des murs bâtis, pour dissuader, des heures de boulot, ce n'était pas assez rapide pour lui.

“- Vous voulez donc être avocate ?”

Nouvel intérêt, après tout, c’était toujours mieux d’avoir un avocat dans son répertoire, sait-on jamais.

Un haussement d’épaule et une tête qui acquiesce, la vie donnait bien du fil à retordre à certains, il n’avait rien à redire sur ça, et en soit, il s’en fichait bien, chacun avait sa vie. Lui aussi bossera ce soir, que le soleil soit là ou non. Il se contenta alors de poursuivre la conversation plus intéressante que de parler des misères de la vie, puis visiblement, c’était quand même aménagé pour les étudiants. En soit, l’ambiance avait l’air cool pour des étudiants, ça devait être plus agréable que certains petits boulots, avec une ambiance plus froide. Mae Ri boit encore, se laissant aller à la conversation et à sa curiosité, poussée par l'ennui, pas l’envie d’aller s’asseoir en tête-à-tête avec son reflet dans la vitrine du café, pour se parler à lui-même.

“- Je vois, donc pas de risque de se faire chasser si on prend trop de temps ? C’est plutôt cool.”

Il connaissait bien les cafés où une fois consommé, il faut laisser la place pour les clients suivant, chassé comme un moins-que-rien alors que le sourire était affiché, tant que l’argent était de la partie. Il demande alors un autre verre, pour s’occuper les mains, un peu déçu que son approche amicale soit ratée, il ne voit pas le mal, ne comprend pas le point de vue de la serveuse, mais tant pis. En soit, il ne la reverra peut-être pas, il n’en sait rien. Du moins, le sujet des études l'intéresse et peut-être que ça lui donnera une excuse pour la recroiser, pensant à ses intérêts, il faut l’avouer, les questions s’enchaînent, et un rire vient s’échouer sur ses lippes, un haussement d’épaule et un air faussement angélique s’affiche.

“- Parce que la justice ne protège que les coupables ?”

Le garçon l’observe alors, un peu plus sérieusement, ayant pris tout de même la “justice” en grippe, quand il y a quelques années, elle l’a protégé quand il était coupable, mais qui n’avait rien fait quand il était victime. Mais en soit, il n’avait rien contre la jeune femme qui n’y était pour rien et il finis par se redresser en s’étirant.

“- Je demande pas pour des soucis avec la police si ça peut vous rassurer. Et ce n’est pas vraiment à l’ordre du jour.”

Pour le moment, la vie est belle de son côté, mais on est jamais trop prudent en soi, il ne pose que les bases de son avenir.

“- C’est combien d'années déjà les études de droit ?”

“- Le savoir est le plus important, ça ouvre beaucoup de portes."

Il aimait beaucoup apprendre, se renseigner, noter les infos importantes juste au cas où. D’ailleurs il appréciait la conversation avec la future avocate. Il s’amusait à voir les réactions de son interlocutrice. Puis il parle de lui, il donne qu’une de ses filières, en soit, la musicologie colle bien avec son cursus d’art du spectacle et de la scène, mais il ne s’étale pas vraiment, contrairement à ce qu’il montre, parler de lui-même n’est pas forcément ce qu’il préfère faire. Il continue tout de même sur le ton de l’humour, sur sa futur notoriété, se donnant le beau rôle, même si au fond, parfois sa confiance s’ébranle, et il s’imagine que sa carrière flop et qu’il soit renvoyé dans son monde morne et sans intérêt.

“- Peut être qui sait, après tout, ça ne fait pas de mal de rêver un peu.”

La remarque de la serveuse ne peut que faire soupirer le garçon, déjà inquiet de ne pas débuter, mais, pour son image, affiche un sourire confiant, toujours garder la face malgré les doutes. Parce qu’il a décidé que plus rien ne l'enchainerait, sans voir les boulets invisibles qu’il se traîne déjà derrière lui.

“- On verra bien, je fais confiance à mon agence pour choisir le bon moment.”

Il hausse les épaules en terminant sa deuxième boisson qui ne pouvait pas durer éternellement. Est-ce que c’était conseillé niveau économie d’en demander un autre ? Il rit alors et hausse les épaules.

“- Vous me semblez plutôt sage pour faire partie des hystériques, mais si vous voulez, je vous signe un autographe, quand je serais connu, vous pourrez vous vanter d’être la première à en avoir un.”

Il sourit alors et tend son verre à nouveau à son interlocutrice.

“- Pourrais-je avoir un dernier verre pour la route ?”

“- Chez Nova… Comme dans novateur, innovation… enfin je divague.”

Un petit rire, peut-être un peu de promotion ne fait pas de mal, même s’il voudrait être l’une de ses idoles connues dans le monde entier et qui impact le monde, c’était pas encore gagné. Mais bon, en visant la lune, on atteindra au moins les étoiles, c’est ce qu’il faut se dire, et c’est sa confiance en lui qui le pousse à ne pas baisser les bras et à continuer sur le chemin qu’il s’est dessiné. Il n’est qu’un garçon qui essaye de ne pas écouter les doutes et les mauvaises ondes.

“- En réalité, pourquoi devoir mettre les boeuf avant la charrette ? Qu’importe l’ordre, tant que le résultat est le même.”

Prenant sa boisson en écoutant les paroles de la serveuse, buvant un peu, haussant les épaules, affichant son plus beau sourire face aux répliques de la jeune fille qui n’a pas tout à fait tort.

“- Une future avocate sait forcément que ça ne serait pas forcément glorieux comme comportement.”

Il cherche ses mots, essaye de ne pas être blessant dans le fond, de ne pas heurter la sensibilité -pour une fois-.

“- Les gens aiment la musique, mais les sasaengs ont passé une limite qui vire à l’obsession et au harcèlement, et peuvent parfois avoir des mots très durs ou des comportements déplacés en oubliant que les idoles ne sont pas des machines, ce qui peut mener à de tragiques évènements. Si vous voulez être avocate c’est que vous aimez aider les autres et êtes assez empathique pour plaider leur cause ? Je doute alors que vous fassiez partie des personnes extrêmes qui oublient de penser à ce que ressent une idole étouffée par ce genre de comportement qui dépasse le cadre d’être fan d’un groupe.”

Il continue de boire tranquillement, en vrai il crachait un peu dans la soupe, ces personnes sont aussi des fans qui écoutent la musique de leur idole, mais ça n’excuse pas vraiment leur comportement. Un peu hypocrite dans ses propos, puisqu’il a souvent peu d’empathie pour les autres, mais l’image compte, et jouer les bons garçons, il sait le faire.

“- Vous ne serez pas déçu, je suis sûr que vous apprécierez assez pour ajouter mes musiques à votre playlist.”

Arrogant ? Peut-être un peu, ou juste l’envie de le dire à voix haute lui donne la confiance en lui nécessaire pour y arriver, crier victoire pour se duper, prétendre savoir déjà le dénouement, mais sans être réellement certain, mais le sourire est là. Un regard qui signifie “tu verras bien que j’ai raison”, avant d’avaler un peu de sa boisson chaude presque refroidi à faire le beau pendant de longues minutes.Chanter,c’est tout ce qu’il sait faire, et il se plaît à s’imaginer à la place des chanteurs les plus connues.

“- Vous avez trop regardé star wars… viens du côté obscure de la force tatatan.”

Il rit, mais n’en pense pas moins, dans son monde remplie d’ombre, il sait bien que la vie n’a pour elle qu’une apparence hypocrite, dont il joue lui-même, jamais vraiment honnête, il s’isole du malheur en l’imitant, se fond dans la masse, se perdant parfois lui-même.

“- Je sais, je décrypte bien le monde.”

Un haussement d’épaule nonchalant, comme une évidence, alors qu’il avait seulement essayé de dire des choses plus flatteuse pour elle qu’autre chose, dans le fond, les avocats et les pseudos justiciers, il n’y croit plus, quand l’enfant en lui se dit que c’est injuste, que lui aussi il aurait voulu être sauvé.

“- On verra bien, au pire vous pourrez vous vanter d’avoir connu le grand Mae ri avant qu’il soit connu. Vous voulez un autographe ? Qui sait, vous pourrez le revendre à prix d’or dans quelques années ?”

Il cache son insécurité derrière une arrogance qui ne fait qu’imiter des autres à la perfection, petit acteur dans l’âme. Il s’amuse de la réaction de son interlocutrice, en exagérant un peu peut-être, il s’occupe comme il peut. Après tout, il n’aime pas vraiment les avocats… Donc il ne sent pas gêné de jouer les garçons un peu chiants. Buvant sa boisson, il rit doucement.

“- Peut-être qui sait.”

Il n’allait pas se battre pour un rôle de décrypteur de monde, on peut voir ça comme de la pure logique, vu que c’est ce qu’il a fait en réalité, juste pour flatter la belle, et visiblement ça n’a pas fonctionné. Et il joue encore, tend une perche, mais encore ça échoue, quand elle ne semble pas voir l’humour dans ses paroles pleines d’ironie, et le gamin est légèrement vexé quand elle pique sa personnalité.

“- Modestie… Quel mot plein d’hypocrisie.”

Le ton devient froid; plus distant, alors qu’il se demande ce que le monde aime dans cette attitude… Après tout, qui l’aimera s’il ne le fait pas lui-même ? Affirmation bien fausse quand il est en réalité le premier à se détester. Mais, jamais plus il courbera l’échine devant les autres, il préfère se cacher derrière un amour propre tellement faux. Hors de question de se déprécier pour se faire apprécier.

“- Tant pis, une fan de plus ou de moins je suis pas à ça près.”

Un sourire revient sur son visage, juste pour cacher qu’il n’a pas vraiment apprécié la pique, légèrement susceptible le petit. Il se lève, sort la monnaie et la pose sur la table.

“- Bon, peut-être qu’on se recroisera un jour. à plus.”

Et le garçon pousse la porte, s’échappe de l’endroit, mettant ses écouteurs pour quitter la réalité qu’il n’aime pas.