tenue ;novembre 2019
le père qui a quémander un rendez-vous; loin d'être normal, comme si tu étais déjà le g r a n d attendu. rien n'y fait, tu l'accueil naturellement. les mots s'enchaînent; s'entraînent jusqu'à ce qu'il aborde ce pour q u o i il était venu. c'est un dossier qu'il dépose devant tes yeux. tes doigts sur le papier, un visage. un prénom (un nom) h y u n hayun. tes pupilles qui se relèvent, tes pensées qui comprennent et ta conscience qui agonise. il a osé te le cacher. jusqu'à présent et là, au moment le plus important l ' a n n o n c e. c'est à t o i de faire les choix nécessaires. ceux qu'il n'a pas pris, ceux qu'il a omis. l'abandon et les nausées laissés après coup(s); après larmes et solitude. tu l'imagines seulement, présumé fils u n i q u e désormais orphelin de tout contact a m o u r.

*** tu n'as pas attendu. elle est autant un danger qu'une envie (de rencontrer). elle est p e t i t e s œ u r. et ce terme qui traverse ton âme te fait presque peur. que dire, que faire (quoi faire). désemparé (presque) alors que tu as autre chose à faire ou penser mais e l l e, devient ton centre d'attention. tu as besoin de comprendre, savoir (apprendre). alors tu décides d'envoyer l'un de tes dirigeants jusqu'à cette faculté fréquentée où elle sera conviée à rencontrer le possible futur m a i r e. ça sonne bien, comme excuse. ton sourire disparu, avoir peur

d'une famille.
parce qu'elle est la tienne (désormais).

fin de journée, soleil encore doré et tu la vois arriver par la grande vitre. le cœur se serre et les idées claires deviennent tempêtes. elle est enfin conviée dans ton bureau, où on l'informe que tu a r r i v e s. (minutes filées) la poignet dans ta main, geste souple (ah! horrible) - même air désormais respiré. mitigé, entre une envie de la prendre dans tes bras (pardon) et de lui h u r l e r de partir.

sourire poli,
sourire joli « bonjour », tu prends place face à elle; et qu'elle est belle, ta s œ u r. « je vous remercie de vous être déplacée », une légère pause, alors que tu remontes au même moment les manches de ta chemise « vous permettez que je vous tutoie ? » (car après tout) « je suis impoli, vous voulez boire quelque chose ? »

tenue ;novembre 2019
Les doigts qui s’entortillent aux hanses de son sac à main et l’estomac en soubresauts, c’est l’effet qu’a sur elle cette étrange invitation, seule dans la voiture étrangère. Peut-être un peu, aussi, d’excitation, la curiosité titillée, à oser se demander si, enfin, dans le chaos qui l’absorbe, viendrait un brin de bonne nouvelle, quelque chose d’un peu grand. Rencontrer le futur maire qu'ils ont dit, c’est pas donné à tout le monde, non ? requête pour le moins inattendue, qui la rend aussi perplexe que nerveuse, à se demander ce qu’un si éminent personnage peut bien vouloir d’elle, l’esprit qui bout à mille degré sous les hypothèses.  

Elle a encore du mal à y croire, et pourtant elle est bien là, à peine quinze minutes plus tard, toute petite dans le bureau imposant où on l’a laissée. Ses prunelles s’éparpillent dans la pièce, à ne pas savoir sur quel détail se poser, elle dégage une formalité aussi intimidante que captivante. Et il est trop tôt quand il arrive enfin. Elle a les lèvres maladroites dans leur sourire hayun quand elle lui rend son « bonjour », le ton plus affirmé qu’elle ne l’est réellement face à celui qui est dans son élément. Elle n’en laisse rien paraître cependant, tout en contenance et en assurance dans son allure. Elle en profite pour le détailler de plus près, en même temps qu’elle hoche la tête sans vraiment réfléchir à sa demande de la tutoyer – est-ce qu’elle est censé le tutoyer aussi ? ça lui semble inapproprié… Elle a fait ses recherches avant de venir, bien sûr, pour tenter  d’avoir une esquisse de cet homme mystère. Ce qui la frappe le plus est la jeunesse de ses traits – elle se souvient le 31 ans noir sur blanc sur wikipédia, à se demander comment un homme si jeune peut se trouver déjà si proche du pouvoir, s’il serait vraiment capable d’endosser un tel rôle. A présent c’est plutôt un brin d’admiration qui l’emporte pour cet homme ayant su se frayer un chemin si vite à la hauteur de son ambition, la prestance  qu’il dégage lui laissant entrevoir assez pour ne pas douter de son potentiel. Entrevoir seulement car il ya a un quelque chose de distant par-dessus tout, comme des barrières érigées dissuadant quiconque de s’aventurer trop près – elle suppose que c’est là un des traits des gens de pouvoir. « je veux bien un café, s’il vous plaît. » elle apprécie ses efforts pour la mettre à l’aise. Plutôt efficaces ; les premières minutes passées lui ont suffit pour reprendre sa contenance, et son esprit divague déjà aux milles questions qui fourmillent en elle. elle a les lèvres qui la démangent, l’envie de savoir ce qu’elle fait ici, ce qu’il attend d’elle – le besoin d’en finir aussi avec cette appréhension qui ne la quitte pas. Mais elle connait assez les codes pour savoir que ce n’est pas sa place, lui seul est le chef d’orchestre de cet échange. Mais elle est trop forte tête pour se taire hayun, elle tente un « merci pour cette invitation. je ne m’y attendais pas » espérant qu’ils ne tournent pas trop longtemps autour du pot.

tenue ;novembre 2019
tu proposes; elle dispose et tu t'exécutes enfin. sa tasse entre les doigts, c'est avec l'appréhension du monde que tu fait semblant d'aller b i e n. car tu te trouves là, sans aucun mensonge, plus impressionné encore que devant les loups affamés. ceux qui tendent à vouloir te voir /te faire tomber. ceux qui, par leur grâce seraient prêt à te mettre plus bas que terre, si prompts à te faire embrasser le ciel (divin). hayun, qui par sa simple voix ô pourtant si douce, pique quelque peu ton cœur d'un stresse imaginaire.

elle finit par briser le dernier silence (avant la sentence) et lorsque tu te tournes, ton sourire demeure p o l i. le marbre posé délicatement sur le bois en face d'elle, c'est le dossier poison que tu attrapes entre tes doigts sous un geste (leste). « ne me remercie pas », une pause (courte). non, aucuns remerciements alors que tu vas p o u r r i r sa vie. « je ne t'ai pas fait venir pour rien », presque comme une affirmation alors que tu ne prends pas place sur ton siège (de roi) mais sur celui à côté d'elle. plus proches encore (plus intimes, peut-être). elle n'est pas ton ennemie, tu n'es pas non plus le (siens). du moins, c'est ce que tu espères, au f o n d.

« je ne sais pas comment aborder les choses, alors excuse moi de le faire aussi vigoureusement », tes doigts entre-ouvre la couverture papier, y sortant là l'acte de naissance (la sienne), son sang et puis le tiens sur le blanc d'à côté. identité du père (des mères) et t r a h i s o n. « je suis désolé. loin de moi l'envie d'être brutal », non aucune envie (aucune) « alors je pense que les papiers en diront plus que moi, pour la crédibilité », un peu perdu (tu l'es). déconcentré, incapable de réfléchir comme tu le fais pourtant si bien. toi qui a l'habitude (luxe), d'avoir la force et le pouvoir, force de décision et de persuasion. te voilà vulnérable (entièrement). « je suis ton frère, hayun », tu réfléchis après coup. l'annoncer ainsi alors qu'elle a le nez dans les chiffres (et couleurs), dans les noms (les senteurs). tes doigts sur ta tempe, loin d'être à ton aise (dans la même position q u ' e l l e); égalité. « je suis désolé », désolé de tout, en effet « si je l'avais su avant », tu aurais sûrement agit plus rapidement (pour sûr), mais peut être moins clément (certain). « si... si tu veux que je te laisse seul un petit moment ? »  à sa guise (pour le moment).

pincement au cœur et déchirure nauséeuse,
fin d'un temps (r é v o l u), tendre
(pardon, hayun).

tenue ;novembre 2019
y’a une tension dans l’air, celle de l’attente interminable de l’annonce pour laquelle elle a été convoquée. Et l’homme a beau tenter, un certain malaise persiste. Il a une aura imposante, aussi captivante qu’intimidante. Et le voir, lui-même, tourner autour du pot, chercher ses mots, ne fait que nouer un peu plus son estomac, les doigts crispés autour de la tasse. Jusqu’à ce que -

Elle ne saurait saisir le déroulement des évènements, les émotions et pensées qui l’ont traversée. Tout ce qui l’emporte c’est l’incompréhension, et cet arrière-goût de mauvais présage au fond de la gorge, un vertige dans son crâne quand elle s’empare du document. On l’embrouille avec des mots qui ne font pas sens - des désolé et des histoires de crédibilité - et elle ne comprend pas ; elle voit son nom sur l’acte de naissance – des lettres et des chiffres sans queue ni tête - et elle ne comprend toujours pas, ce que ce papier fait là, elle fait même pas le lien avec le nom de l’homme en face d’elle, hyun,

jusqu’à l’affirmation fatidique qui arrête son cœur comme elle coupe son souffle,

je suis ton frère, hayun.

Il y a un côté risible à cette situation, ces mots qui sonnent comme un réplique clichée de mauvais film, mais ils retombent entre eux comme un poids lourd, et bam - elle peut entendre distinctement l’éclat de son monde qui vole en morceaux, la chute sourde des fragments contre le sol. Et le refus, confus, d’abord. « je – je vois pas… il doit y avoir erreur » les lèvres qui se pincent en même temps qu’elle cherche ses mots, tente de remettre de l’ordre dans le tourbillon intérieur, les sourcils froncés, et les doigts qui froissent la feuillent sans s’en rendre compte sous la crispation. « je n’ai pas de frère. » le ton porte la dureté de la certitude – du déni. c’est des souvenirs enfouis qu’elle refuse d’affronter, un passé volé qu’elle ne veut contempler.

Et soudain elle ne peut supporter, son air désolé, ses excuses vides, sa fausse compassion. ses prunelles s’ancrent dans celles de l’autre, les affrontent, vibrantes. « vous vous prenez pour qui ? » oubliées, les bonnes convenances. Elle a les émotions en vrac qui l’emportent sur tout, et quand elle est comme ça ya plus de raison, seulement des mots bruts qui s’échappent, tranchants. le désarroi et la révolte enrobés de syllabes. Il a pas le droit, de remuer les souffrances qu’elle laissait dormir, de déchirer son cœur de ces marques qui cicatrisaient. Et tout ça pour quoi ?  « je ne sais pas quelle genre de mauvaise blague ou de manigance ... » parce qu’elle ne peut y croire.

les maux qui la tourmentent, les émotions qui la submergent. Elle ne peut croire qu’on lui annonce nouvelle de cette envergure avec une telle formalité, une froideur qui tranche avec le brasier qui l’habite. désolé, il dit ? qu’aurait-il fait, s’il avait su plus tôt ? elle n’imagine pas une once de sincérité en lui, ne peut s’empêcher de penser que c’est une combine pour une raison qui lui échappe, qu’il lui cache quelque chose, derrière son air vide. « non ! je veux pas être laissée seule ! » la colère vient avant la douleur, tout est encore trop confus pour qu’elle pense à avoir mal « je veux des explications. » et elle n’est pas gamine chamboulée quand les mots fusent, elle est femme impétueuse et implacable.

tenue ;novembre 2019
il y a un décalage; une idée folle. la belle perdue au milieu du monde (le tiens) - qui a pour conséquences des vagues dont elle ignore (tout). et enfin

l'insolence dans les mots,
l'incompréhension dans les doigts;
le rejet (dans la voix).

elle surgit, pas de frère (jamais dit) et puis toi qui ne fait (que) la regarder. les contemplations t e r m i n é e s, les idées confuses, diffuses qui ne cessent de tourmenter - son passé, le tiens qui espèrent former futur (presque) mensonge. toi-même tu n'y crois pas, malgré les lettres déposées sur le papier.

et dès lors, la lionne s'insurge lorsque tu lui demandes si elle préfère la solitude à (toi). courtoisie qui te perds, aucune idée de ce que tu devrais faire (finalement). pas habitué à la f a m i l l e, (aux autres), filles et surtout pas celles qui partagent ton s a n g. un léger souffle, tes doigts qui passent nerveusement sur ta tempe du côté droit; coude déposé sur le bois (putain).
des explications quémandées; légitimes (surtout). « très bien », tu te redresse légèrement, déjà (trop) droit, tes mains laissées pour compte finalement; l'une jouant (faussement) avec un stylo, la seconde appuyée sur ta jambe. première fois que tu te retrouves sans aucuns m o y e n s; première fois qu'il faut nommer fasse à e l l e ----petite sœur.

« je ne connais pas les détails », bien entendu. tu n'es ni l'inventeur ni le responsable; simple chaos. « dix ans nous séparent; mon... notre père est donc allé voir ailleurs », simple constatation, simple énonciation des f a i t s; « avec ta mère. visiblement lorsqu'il a apprit ta présence il a préféré fuir », désobligeance. « il a donc laissé ta mère pour compte pour revenir avec nous. nous n'en savions rien, évidemment. jusqu'à présent »

fin tragique,
un soupire pour toi-même. « il m'en a sûrement parlé maintenant parce que j'en arrive à un point dans ma carrière où cela pourrait me faire du tord. et je m'en excuse », sincérité dont tu fais preuve, autant l'être dès le (départ). « sincèrement ».

et ton monde s'arrête ---un instant. un sourire, léger s'anime sur le bout de tes lèvres alors que tu la regarde (toujours). « il n y a aucune manigance, aucune mauvaise pensée », une légère pause (infime) « je préfère simplement te l'annoncer, plutôt que tu te retrouves dans un foutoir médiatique du jour au lendemain »

lentement tu te lèves, attrapant sur la commode contre le mur l'un des grands verres. l'eau versé, tu mimes ton geste pour finalement lui en apporter un également. porté à tes pulpes, tu le poses sans venir te rasseoir, appuyé contre ton bureau

« est-ce que ça va ? », simplicité d'une question qui révèle déjà

grand esprit annonciateur
protecteur;

blessé à son égal,
retrouvé là dans une femme
(inconnue). h a y u n que tu as envie de prononcer;
âme silencieuse et tu te tais.

tenue ;novembre 2019
entre trouble et chaos, l’esprit encore hébété et les veines en feu, elle tranche avec le calme frais de junghwa. c’est que rien ne transparait dans ce visage taillé de marbre,  dans sa voix un simple détachement méthodique lorsqu’il évoque les faits. contrôle parfait de ses émotions, ou indifférence vexante, hayun ne sait pour lequel pencher, junghwa est encore une énigme qu’elle doit apprendre à percer. quelques indices seulement – ici, un soupir bref, là un doigt sur la tempe. mais qu’en est-il derrière, est-ce appréhension ou ennui, anticipation ou contrariété. elle lui en veut de réussir à rester tranquille dans une telle situation.

et les mots qui s’échappent de ses lippes plantent des épées dans son cœur. désobligeante cruauté, il lui balance avec désinvolture les vérités qui trouent son diaphragme les unes après les autres.

elles n’étaient qu’un voir ailleurs

il est revenu vers eux

il a préféré fuir lorsqu’il a appris sa présence

quelques minutes suffisantes pour briser en mille morceaux des années d’espoirs et d’illusions. (fini le doute) petite hayun qui dessinait sur feuilles blanches d’écolières un portrait de famille avec un papa à ses côtés, qui s’inventait des histoires – une mission d’agent secret, un kidnapping, une mauvaise dispute avec maman, la mort, peut-être. toujours une bonne raison à son départ
– mais jamais e l l e ( l’erreur, l’indésirée ) .
elle a gardé une petite flamme au fond du cœur, mais junhwa a soufflé sur la bougie.
il déchire son palpitant de ses propres doigts, mais hayun refuse de faire tomber les larmes. elle encaisse en silence, menton relevé (petite reine ne flanchera pas devant lui), les poings qui se crispent quand elle toise le premier, le voulu.

il y a pourtant, dans les mots de son frère, comme une sincérité, un air de tristesse, dans ses désolés. et c’est peut-être ce qu’elle cherche, dans ses traits, ses gestes, ce qu’elle ose croire trouver; une forme de tendresse, à laquelle s’accrocher. si ce n’est un début d’amour, au moins dans les yeux d’une personne l’acceptation plutôt que le rejet  – croire qu’elle n’est pas toujours l’indésirable. mais le voilà qui gâche tout, avec ses mots crus.

voilà ce qu’elle est pour son géniteur – une épine dans la carrière de son fils. Il faut croire qu’elle ne sera pas plus que ça pour sa famille – un risque de foutoir médiatique.

elle a envie de crier. elle a envie de pleurer.

un soupir et puis,
« je vois »

hayun aussi elle sait simuler – que tout va bien, que rien de va mal. elle replace ses mèches volantes derrière son oreilles, lisse les plis de sa robe ; garder la main sur son apparence est le premier pas pour garder contenance, reprendre le contrôle de ses émotions. et sa main tremble à peine lorsqu’elle accepte le verre, les gorgées froides venant rouler contre la boule au fond de sa gorge.

et la goutte de trop, elle est dans les mots attentionnées de l’autre hyun. ce n’est sûrement qu’une formalité, mais elle a envie d’y croire, de s’y agripper, à cette inquiétude. mais le rejet est partout ici – dans les vérités qui résonnent encore à ses oreilles, dans cette pièce somptueuse où elle n’a pas sa place, est simple perturbatrice d’une carrière en danger. et tout ça se mêle à la colère, la haine qu’elle ne peut empêcher d’éclore, la jalousie pour ce frère qui a tout volé. ses lippes s’étirent d’un sourire réflexe, faux comme elle sait faire.   « je vais bien, merci. » le verre tinte contre la petite table lorsqu’elle le repose et se relève. « je vous remercie pour m’avoir prévenue. je garderai ça pour moi. » car c'est la méfiance qui a conduit l'homme à l'appeler. mais pourquoi voudrait-t-elle révéler à la ville entière sa honte? «  maintenant je ne veux plus avoir à faire à votre famille ». elle lui adresse un dernier salut respectueux et quitte la pièce dans un claquement de talons.

elle ne pourrait retenir les larmes trop longtemps.