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    Une fuyarde, il n'y avait pas de meilleur mot pour décrire Yaeil. Elle avait toujours fui. Que ça soit ses parents, son école, ses sentiments, elle avait toujours tout fui quand ça ne lui plaisait pas. Elle n'avait tout simplement pas la force de se battre. Cela venait peut être du fait qu'elle était consciente que sa vie n'avait pas beaucoup d'importance, que ça servait donc très peu de se battre, et que ça ne changerait pas grand chose de s'enfuir. Elle en avait les moyens, et elle rêvait de liberté. C'était donc parfait. Et elle avait déjà fui Namsoo plusieurs fois, alors, encore une fois, elle disait que ça ne changerait pas grand chose. Même si cette fois, c'était différent. Namsoo et elle ne s'étaient jamais vraiment disputés. Ils n'ont pas eu que des discussions ou des situations plaisantes, mais jamais encore ils ne s'étaient quittés avec une impression de non-dit, un problème flou, un sentiment étrange de déception, ou un mix de ces trois réunis. Et vu le sujet duquel c'était parti, Yaeil était simplement terrifié. Comme si cette boule au ventre avait un goût de fin. Mais Yaeil ne voulait pas que ça se finisse. Elle savait qu'elle avait fait du mal, il lui en avait fait aussi, et c'est ça qu'il lui faisait peur. Parce qu'elle n'était pas la seule à blamer dans cette histoire et qu'elle n'était pas habituée à ces sentiments. D'habitude, c'était elle qui s'accablait, c'était toujours plus simple, et là, elle lui en voulait un peu. A lui, cet homme pourtant parfait, qui n'arrêtait pas d'essayer de lui parler. Au départ, il y avait eu un peu de silence insupportable. Ensuite, il avait demandé à la voir, mais Yale était partie à la plage avec Saetbyeol. Lieu de refuge. Quand elle était revenue en ville, il avait encore une fois tenté de la voir, mais elle avait toujours trouvé quoi faire de mieux que de rester chez elle. Et puis, maintenant en était arrivé le point où elle ne répondait juste plus. Elle savait que c'était horrible, elle se doutait atrocement que Namsoo devait souffrir de la situation, et elle s'en voulait. Mais c'était les seules armes et les seules défenses qu'elle avait. La fuite, le silence, il n'y avait que comme ça qu'elle avait réussi à survivre, car sinon elle finissait toujours par sombrer.

    Les jours n'étaient même plus comptés, cela faisait peut être des semaines. C'était une torture en réalité, parce que Namsoo lui manquait. Et elle apprenait encore à naviguer entre ces sentiments. Elle se demandait comment elle pouvait ressentir de la peur, de la colère, des regrets et du manque en même temps. Namsoo aurait probablement la réponse, ça elle le savait, mais le plus elle l'ignorait, le plus elle avait peur de lui demander. Yale ne savait plus quoi faire, car cette fuite ne l'avait pas apaisée le moins du monde. Et elle savait qu'elle devait la terminer. Elle ne savait juste plus comment. Terrorisée par la paranoïa, elle s'était mis en tête de devoir faire le plus possible pitié, pour ne pas que Namsoo la jette sans même hésiter. Et puis, elle voulait juste faire un effort, pour qu'il comprenne qu'elle restait désolée, qu'elle lui faisait du mal, mais qu'elle ne savait pas vraiment s'en empêcher. Ce jour là, alors, elle avait pris son peu de courage à deux mains. Et, elle était arrivée sur le campus de l'université. Elle avait garé sa moto au même endroit qu'elle l'avait fait le jour de la fête du printemps. Elle avait déposé son casque sur son guidon, et elle s'était avancée vers le premier batiment. C'était un peu stupide, elle ne savait pas si Namsoo allait passer par là. Ce n'était pas devant celui là qu'ils s'étaient recroisés la première fois, et elle ignorait les matières qui y étaient enseignées, mais elle était trop tétanisée pour aller plus loin de toutes façons. Alors, assise, toute raide sur le premier banc qui était installé, elle regarder les pieds passer devant elle. Jamais elle n'oserait regarder les étudiants dans leurs yeux, et elle avait espoir de reconnaître Namsoo grâce à sa démarche. Namsoo, lui, peut être qu'il ne la reconnaîtrait pas, à cause de ses cheveux blonds, mais il n'y aurait que sa petite amie pour trembler autant aux abords d'un campus inoffensif.

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    Assise sur son banc, Yale regardait le sol, tremblotante. Le temps se dépensait, et donc la peur la gagnait. Ce n'était pas la meilleure idée d'attendre ici, car cela ne faisait que la stresser d'autant plus. Mais en même temps, c'était aussi la meilleure idée pour prouver à Namsoo qu'elle était sincère. La jeune fille était partagée. Totalement déchirée. C'était d'un côté cette peur qui la grignotait. Celle à cause de qui elle avait fui tout ce temps. Yale était terrifiée. Terrifiée de voir Namsoo arriver pour rompre avec elle définitivement. Elle avait si peur qu'il la lâche, car elle avait tellement grandi à ses côtés, et elle touchait le bonheur du bout des doigts. Elle ne voulait pas qu'il la quitte maintenant, cela ne ferait qu'effondrer son château de carte avec fracas, et elle ne savait pas si elle aurait les capacités de le reconstruire seule. Mais elle avait aussi peur d'autre chose. Peur qu'il ne comprenne pas pourquoi il l'avait blessée, ce jour là. Et Yale ne savait pas ce qu'elle ferait si il ne s'excusait jamais. Car il devait savoir qu'elle se battait chaque jour pour s'aimer un peu plus, grâce à lui, et que c'était terrible d'avoir l'impression de ne pas être assez. Comme si tous les efforts étaient sans cesse vains. Car il avait beau lui répéter souvent; ces mots sont bien moins forts que les actions.

    La peur, c'était un côté. L'autre côté, c'était justement celui qui se battait. Cette rage de s'améliorer, de devenir meilleure. Cette envie de laisser ses chaînes derrière elle, et de s'envoler. Cette facette d'elle que Namsoo a soignée, et qu'il aide à accompagner. Car Yale, celle qui fuyait tout le temps le temps que les choses se tassent, elle avait bien compris que ça ne se tasserait pas tout seul. Et elle veut changer ses habitudes. Elle en a marre d'être passive. Elle veut être comme Namsoo, un peu, elle veut montrer du courage et aborder les difficultés. Elle l'a compris, encore une fois grâce à lui, tristement grâce à cette dispute. Alors elle veut régler cette histoire, elle veut résister. C'est pour ça qu'elle est là, même si ce lieu la hante, et qu'elle a encore envie de courir. Elle veut être forte. Car elle veut que la dernière image qu'il ait d'elle avant d'éventuellement la jeter soit celle d'une femme qui en valait la peine. Car elle ne voudrait pas qu'il la piétine en partant.

   Le temps passe, lentement ou non, elle ne sait pas. Pour rester sur ce banc, elle pense à des choses futiles. Elle n'a pas mis de mascara car elle avait peur de pleurer. Mais elle a évidemment mis son noir-à-lèvres sans qui elle ne pourrait affronter cette foule. Elle se dit qu'elle aurait dû en mettre plus. Qu'elle aurait quand même dû mettre du mascara. Elle aurait dû se rajouter des colliers, des bagues, des boucles d'oreille... Elle pense à son vernis quand elle voit des chaussures s'approcher d'elle. De belles chaussures, simples, en cuir italien. Yale sait que n'importe qui de riche pourrait en porter, mais elle les connaît par coeur. Elle sait exactement à qui appartiennent les petits plis d'usure placés comme cela, sur cette grande pointure. Doucement, avec peur, elle lève les yeux sur son petit-ami, lui laissant découvrir son visage éclairci par ses cheveux, en même temps qu'elle se perd dans les yeux de son amoureux. "..." C'est dans cet instant qu'elle aurait pu balbutier n'importe quel mot. Mais le regard de son petit-ami est glacial. Et certes, il est toujours comme ça, mais là elle sent la vague de blizzard la frapper de plein fouet. Et de toutes façons... Elle s'en veut déjà pour le silence qu'elle lui a imposé. Alors elle se lève, et abaisse la tête à nouveau, immédiatement, de honte. Sa frange cache le peu de son visage encore visible, et voilà que Yale ferme les yeux alors qu'elle essaie de ne pas pleurer. Elle s'était promis de rester forte... "J-... Je suis désolée." Elle chuchote, sincère, mais complètement terrorifiée. Elle s'avance juste un peu alors qu'elle essaie de s'incliner, son front se collant donc involontairement contre le front de Namsoo.

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    C'est immédiat, comme un réflexe. Les bras de Yaeil se referment immédiatement autour de Namsoo dès qu'elle sent qu'il l'a entouré des siens. Ce n'était pas fait exprès. La jeune fille ne cherchait pas l'étreinte en s'excusant, ou en s'inclinant. Elle était dans sa sincère démarche d'aborder le dialogue, de lui montrer qu'elle regrettait ce silence qu'elle avait imposé. Mais le contact l'avait trouvé. Et c'est comme si un poids énorme venait de l'abandonner. Cela peut paraître peu. Et peut être que Namsoo en avait lui aussi besoin de ce contact physique. Comme si c'était la preuve de leur guerre froide terminée. Mais pour Yaeil, c'est beaucoup plus que ça. Par ce simple geste, Namsoo venait de prouver qu'il ne l'abandonnerait pas. Et à travers cette chaleur, elle ressentait qu'il avait compris. Il avait compris l'effort que c'était pour elle de venir ici. Et elle se doutait bien qu'ils devront parler, qu'elle devra s'expliquer. Elle connaît assez bien son amoureux pour savoir qu'il ne suffit pas d'une étreinte pour combler des semaines de silence. C'est un prince charmant mais qui n'en a que l'apparence, pour le reste, il est très pragmatique. Mais c'est justement une chance. Par ce câlin, il lui octroie cette chance de s'expliquer. Il la garde auprès de lui, et il lui rend la force qu'elle a témoigné pour se trouver ici devant lui. Même dans ses excuses, il lui donne l'espoir que cette discussion à venir ne sera pas que contre elle. Ils vont parler, ensemble, et ils vont s'en sortir plus forts. Elle le sait déjà, elle le sent. C'est la confiance qu'il lui donne. Et elle a tellement confiance qu'elle n'insiste même pas pour lui dire que c'est vraiment elle la fautive, qu'elle mérite qu'il la quitte, qu'elle est horrible. Elle se contient cette fois. Elle avouera ses torts, mais d'une façon raisonnable.

    Le visage relevé, les cheveux dégagés, Yaeil a les yeux qui pétillent. Elle regarde Namsoo d'un air encore triste, mais amoureux et reconnaissant. "Merci." Elle esquisse même un sourire timide, un peu en moue. "Je l'avais fait il y a des années... Après le lycée..." Elle explique brièvement même si Namsoo s'en fiche probablement. Maintenant qu'il y a un peu d'espace entre eux, elle lui attrape la main, espérant qu'il ne la rejette pas. Elle sert ses doigts contre lui. "Oui... oui j'ai mangé. Promis." Comme d'habitude, elle a sauté certains repas, ou certaines fois elle a fait comme à son habitude: commander cinq plats pour n'en finir aucun. Mais justement, elle a quand même gardé un rythme normal de repas. Comme une nouvelle preuve qu'elle pensait à Namsoo, même si elle ne lui parlait pas. "Enfin... Aujourd'hui je n'ai pas mangé! si c'était ça que tu demandais... je ne pouvais pas manger. Et puis... Je t'attendais. Tu veux qu'on mange ensemble? Je peux te faire des nouilles..." Yale répond, regagnant peu à peu son ton habituel. Elle est plus en confiance. Et puis... Elle a surtout envie de quitter cet endroit. Retrouver son Namsoo loin des regards qui pourraient la juger. Et surtout qu'ils puissent se pardonner, pour recommencer à s'aimer sans se faire du mal; comme ils ont pu constater en être capable.