longue fut la nuit, du temps morose qui n'a pas aidé l'amnésique à passer les heures, malgré l'usage à ses maigres heures à travailler au noir. sans papier, c'est risqué, beaucoup trop risqué pour qu'on le voit régulièrement au club. et eden ne s'attarde pas à implorer qu'on l'aide, le si pauvre gamin ayant rien à son nom. au contraire, il ne s'abaisse pas à ce niveau, se poussant dans tous les domaines possibles, si ça peut l'aider à manger la semaine d'après. et ce, même s'il a dû passer outre ses valeurs, au point à se mépriser soi-même. il ne prétend plus être sans vice, mais ça a laissé un trou béant à la place de son coeur, la honte éclatant sa personne à chaque moment où il pense un peu trop. il se doit d'admettre que dans la plus minime des chances que son passé ne soit pas perdu, qu'il ne soit pas un être humain terrible, à ce point, il a quand même bousillé sa propre vie, suivant ses choix antérieurs fait pour survivre. un choix qu'il s'est imposé, mais qui a laissé un trou béant, un vide qui l'empêche encore de dormir la nuit. l'air froid happe son visage tandis qu'il sort du club, sans direction ni endroit où se poser. une pensée lui vient, la possibilité de contacter nana, elle qui maintient sans cesse qu'il est la bienvenue à tout moment, mais il ne veut l'incommoder. refus total de se plier à l'idée, gamin trop fier qui ne veut jamais demander de l'aide, quitte à se retrouver à l'extérieur jusqu'à l'ouverture de l'église. entre temps, rien n'est possible, autre que de traîner dans les rues de séoul et s'arrêter occasionnellement en chemin. ennui mortel qu'il ne peut changer, alors il s'active, se traînant les pieds dans les rues plus ou moins peuplé d'insadong. une bonne vingtaine de minutes se sont passées avant qu'il ne se soit rendu compte de la silhouette suivant ses moindres mouvements. et encore, ce n'est qu'à ce moment qu'il réalise de la lourdeur sur ses épaules, eden. et il prend peur, ne pense pas avant de tourner le coin d'une rue dont il ne reconnait pas. amnésique qui s'agite, le coeur au bout des lèvres, paniquant à l'idée qu'on le connait. lui, lui qu'il ne reconnait pas en se regardant dans le miroir. clignement de yeux, espérance qu'on a disparu, rien que pour tourner un énième coin, rien que pour se trouver devant la silhouette le suivant partout. prend tes distances si tu veux, tu ne t'échapperas pas. est-ce qu'on te parle, eden ? il a cette impression de reconnaître cette voix, d'un passé proche. pas d'avant avant, non. quelques mois, tout au plus. et ses yeux s'écarquillent tandis qu'il relève les yeux, reculant d'un pas alors qu'on tente de l'agripper. non, qu'il souffle, s'échappant de justesse. pas cette fois-ci. faut comprendre qu'il est sur le point de tomber, eden. la bagarre, ce n'est pas pour lui. s'échapper, prendre les jambes à son cou, c'est ce qu'il connaît, mais il s'essouffle rapidement, entame une autre voie, et saute sur la première occasion de s'échapper de cette situation. p-pas un mot, je- je ne suis pas là désespoir qui s'entend à ses paroles, alors qu'il titube derrière l'étranger, se cachant entre lui et le mur. incapable de demander de l'aide, refus total, il attend plutôt, espère qu'on le manque. bruissement de pas qui le cherche, eden se laisse tomber au sol à la seconde où ils passent sans le voir. on va me tuer, un jour. rire  incrédule qu'il laisse échapper, avant qu'il ne se répète, la voix tremblante, désormais. on va vraiment y parvenir.

outfit ━ les lames de ses patins qui glissent sur la glace lisse de la patinoire l'emplit d'un bonheur qu'il n'atteint pas autrement. même si tous ses souvenirs sur la glace ne sont pas qu'heureux. il repense notamment à sa participation aux jeux olympiques d'hiver de 2018. probablement son souvenir le plus douloureux, alors qu'il a perdu sa mère pendant sa prestation qui lui a valu sa médaille de bronze. et même s'il rêve de participer à nouveau à ceux-ci, il n'y est pas parvenu lorsque l'occasion s'est présentée. c'est qu'il a eu beaucoup de mal à faire le deuil de sa chère maman et de se dire qu'il était désormais seul au monde. sans famille. puisqu'elle était sa seule et unique famille. elle a sacrifié tellement de choses pour lui et il n'a pas eu le temps de la remercier correctement. alors qu'il est replongé dans ce moment difficile de sa vie, il enchaîne les mouvements machinalement. une routine qu'il connaît par coeur, à force de l'exécuter. c'est une figure ratée qui le ramène sur terre brutalement, alors que son corps heurte avec violence la surface gelée sous ses pieds. un gémissement lui échappe, tandis que la douleur l'envahit. il y avait longtemps qu'il n'avait pas été si déconcentré par ses pensées que ça l'a fait tomber. il y avait désormais une promesse d'ecchymose lorsqu'il s'éveillerait le lendemain matin. hye reste au sol quelques instants, le temps de souffler, avant de se relever pour quitter la patinoire doucement. une fois les patins retirés de ses pieds, il les range dans son sac, enfile sa grosse veste de laine faisant office de manteau en cette période de l'année et il sort du bâtiment. l'air frais de l'extérieur lui arrache quelques frissons, mais il avance sans rechigner. alors qu'il tourne le coin du mur de briques, il est entraîné dans l'élan d'un inconnu qui se cache derrière lui, entre le mur et sa personne en lui intimant de ne pas parler pour éviter de divulguer sa présence. le garçon est surpris, comme le démontrent ses yeux arrondis, mais il garde le silence, sort même son téléphone portable de sa poche pour y regarder quelque chose de fictif, lorsque passent près de lui ce qui ressemblent franchement à des malfrats. le pulsant qui s'affole, il se félicite de son réflexe rapide afin que ces gens ne le soupçonnent pas de quoi que ce soit. l'individu s'effondre ensuite en marmonant quelques paroles et le patineur professionnel s'agenouille à ses côtés. "hey, est-ce que tout va bien?"

est-ce que tout va bien ? les paroles résonnent pendant un moment et il se doit d'étouffer la réponse cynique qui lui vient à l'esprit. il n'est pas d'humeur, eden. pas après avoir échappé de si près à cette personne qu'il a cru du passé. ( le passé proche, celui dont il a encore souvenir, celui dont il a le contrôle. ) sa vie lui échappe des mains à chaque moment où il pense enfin en avoir la maîtrise, effleure du bout des doigts la stabilité avant que tout ne s'écroule sous son poids, qu'un autre moment chaotique déboule pour causer des problèmes. les regrets sont nombreuses, pour eden. de son amnésie qui l'a séparé de sa famille, sa vie, peu importe ce qu'il a pu avoir auparavant, il a toujours eu une certaine peur qu'il ne soit pas à la hauteur, qu'il ne soit qu'une personne horrible, caché ( sauvé ) derrière l'oubli. et pourtant, malgré la terreur, de son temps passé à séoul, il a dû se mettre à des niveaux auquels il n'a jamais voulu. la honte le prend à repenser à ce qu'il a dû faire au tout début pour survivre, problème qui le rattrape finalement après des mois sans apparence. sur le coup, il se sent con. évidemment que ça allait le rattraper, comment a-t-il pu être aussi naïf de croire qu'on le laissera seul ? pour quelqu'un voulant à tout prix ne pas être une personne horrible, pour quelqu'un absolument terrifié à l'idée de découvrir un passé honteux… l'hypocrisie est là. pourtant, il parvient à justifier ses actions du présent par se convaincre que ça a été par survie. sans ça, qui sait où il se trouverait de nos jours. il tente d'oublier, d'oublier et de laisser derrière lui tout ce dont il ne veut se souvenir. pour le moment, il est sauf. toujours assis, le coeur tambourinant contre son torse, il réprime l'envie de soupirer face à l'inconnu et d'y ressortir sa froideur. après tout, il l'a aidé. en quelque sorte, du moins. il n'a pas interpellé l'attention de ceux qui le suivait et eden ne veut pas imaginer ce qui se serait passé si on l'avait attrapé. et il reprend son souffle avant de lui répondre, le regard déviant sur l'inconnu, qui vient de s'accroupir à côté de lui. ça va, qu'il marmonne, tout simplement. expliquer ce qui vient de se passer n'est pas dans ses plans. la déchéance est la sienne et la sienne seulement. ( je n'ai pas besoin d'aide. ) qu'il pense, faussement. c'est rien. mensonge qu'il souffle sans l'ombre d'une hésitation, parce qu'il s'est habitué, eden. de mentir, de dire que tout va bien, qu'on n'ait pas besoin de s'inquiéter. même s'il a le coeur qui ne peut s'arrêter de paniquer et les mains qui tremblent. il a échappé à son destin pour le moment, mais qui sait lorsqu'on va le retrouver de nouveau ? ce soir au plus tôt ou dans les semaines à venir, ça ne change rien.

outfit ━ le coeur qui se débat encore avec force, hye est accroupi aux côtés de cet inconnu. visiblement, ces derniers ont un problème avec lui. c'est un peu de cette façon, par hasard, qu'il a fait la rencontre de yunho et aujourd'hui, ils partagent le lit l'un de l'autre. néanmoins, avec celui qui se trouve devant lui, il y a peu de chance pour que le schéma se reproduise. déjà, parce que hye n'est pas à ce point désespéré et parce qu'il désire se contenter d'une seule personne en l'instant. disons qu'avec son aîné, ça a été le coup de coeur du point de vu purement physique. totalement le genre du patineur. bref, ce n'est pas tellement le moment de penser à ça. le jeune homme au sol ne semble pas aller bien. enfin, de ce qu'il constate. sa respiration est saccadée, mais c'est probablement dû à sa fuite. ce qui ne ment pas, toutefois, ce sont ses mains qui tremblent. sa voix lui parvient finalement et il lui semble qu'elle n'est pas non plus stable, à l'image de ses mains. il ne peut que le croire sur parole, puisque de toute façon, il ne dénote aucune blessure physique pour le moment. il a sûrement juste eu bien peur. toutefois, hye n'est pas prêt à croire qu'il ne s'agit de rien. pour se faire poursuivre ainsi, c'est qu'il y a une raison. "mmmh, je ne crois pas que ce soit rien, mais je ne vais pas non plus m'immiscer. l'important, c'est que tu ne sois pas blessé." bien franchement, il ne sait pas trop quoi faire pour lui venir en aide. surtout qu'il doute que ce dernier le laisse l'aider d'une quelconque façon. encore tout de même un peu inquiet, hye s'étire un peu pour pouvoir regarder hors de la petite ruelle. il veut s'assurer que les malfrats ne sont plus dans le coin. "je pense pas que de rester ici trop longtemps soit une bonne idée. je connais un endroit où ils ne risquent pas de te trouver, si tu veux." et il pense bien sûr à la patinoire d'où il revient. au moins, à cet endroit, il pourra souffler sans subir l'angoisse qu'ils reviennent sur leurs pas à tout moment. il ne sait pas si l'inconnu sera enclin à le suivre, mais il ne peut pas s'abstenir de lui proposer une alternative, bien que temporaire.