Quatre heure du mat´, le suv est de sortie. Pas de sourire derrière les vitres teintées, ça tire un peu la gueule, c'est que t'avais pas franchement envie de sortir. T'as pas de mal à jouer au transporteur, faire des bornes avec la cam à l'arrière ; mais le taxi... ça t'emmerde, ça te fait chier ; c'est bien pour ça que tu traînes des pieds. T'as bien essayer de négocier, mais faut croire que t'es le seul homme de confiance lorsqu'il s'agit d'escorter la poule aux œufs d'or jusqu'à son nid douillet.

Parqué devant le bâtiment, trop habillé, tenue correcte exigée ; le boss a insisté :: ( quitte à attirer l'œil, autant être bien sapé ) :: appuyé contre la caisse, immobile comme un piquet, tu fouilles tes poches à la recherche d'une clope égarée. T'en tires une d'un paquet méchamment entamé, puis tu l'allumes dans la foulée. Dehors, le froid agresse tes mains, t'obliges à les cacher. Les yeux rivés sur un lampadaire, tu le fixes à t'en griller la rétine ; ça t'évites de trop penser à Jihae en particulier à ce plan merdique que t'as élaborer pour le récupérer, t'expliquer ou le sauter ; franchement tu ne sais plus.

T'as plus les idées claires depuis que tu l'as recroisé. Trop con pour admettre que ça t'as chamboulé, ta colère, c'est sur son daron que t'as prévu de la passer. Un horrible rictus sous le nez, t'en oublierais presque que t'es venu chercher le déglingué ; parce qu'une porte claque dans la nuit, tes mirettes changent de cible et trouve Soonki. Le sourire se fane tandis que tu te redresses. La clope encore fumante au bout du bec, tu fais le tour de la bagnole : « Monte. » pour seule parole, t'ouvres la portière arrière pour l'y faire disparaître.   

débauches d'une nuit. le quotidien de soonki qui donne son corps à qui le veut bien. qui tourne des scènes inappropriées devant des caméras. un métier considéré comme sale, mais auquel il s'adonne avec un plaisir immense. seule façon qu'il a trouvé pour canaliser cette hypersexualité qui le définit. du sexe dans un cadre protégé. le contrôle lui échappe trop souvent, alors il se doit de le donner à d'autres pour le garder dans le droit chemin. des relations pas toujours consentantes, il en a à la pelle avec le gang. prisonnier, les mains liées, il ne peut rien faire que de subir. oui, soonki est beau et désirable. oui, il drague en quasi permanence. et oui, il n'arrive jamais à dire non. ou plutôt, son corps l'oblige à dire oui. véritable addict à l'acte en lui-même et ça l'effraie depuis toujours.

les muscles endoloris, le garçon étire ses bras et laisse échapper un bâillement. la soirée et la nuit ont été éprouvantes. une satisfaction qu'il pense atteinte, sans toutefois se leurrer. soonki est rarement satisfait à cent pourcent. il retrouve ses habits après s'être rapidement douché pour faire disparaître la sueur et autre fluide sur sa peau. enfin propre, c'est avec le sourire aux lèvres qu'il fait claquer la porte pour y apercevoir son chauffeur de l'autre côté. il ne sait pas pourquoi il est aussi heureux de voir skylar à chaque fois. peut-être à cause de sa belle gueule de con.

l'accueil est aussi chaleureux que d'ordinaire. c'est-à-dire, complètement glacial. et ça le fait sourire encore plus. d'une espièglerie certaine. "on est content de me voir, visiblement." et lorsqu'il passe à côté de lui, il ne peut empêcher sa main de se glisser sur son fessier pour y enfoncer ses doigts. "oops, ma main a glissé." c'est tout ce qu'il dit en montant dans le véhicule, non sans laisser un soupir lui échapper une fois assis. "skylar, pourquoi t'es toujours si canon? ton good look me rend toujours thirsty, c'est si injuste."

À quelques détails près, le plan est déjà complètement élaboré. Un soir, sans cirer gare, tu lui tomberas dessus. Dans l’obscurité, l’intimider et s’il résiste, gentiment, le bousculer. T’ignore à qui exactement sa famille doit du fric mais, pour ces gens, tu te feras passer. Visage masqué, assurément, tu lui referas le portrait comme il a saccagé celui de Jihae. Satisfait à l’idée de le voir saigner ; et peut-être même te supplier ; un sourire prend forme sous ton nez.

Il disparaît sitôt le déglingué dans tes pieds. Les yeux roulent dans leurs orbites, déjà soûlé par son rictus amusé . La joie n’est pas partagée, ça te fait toujours chier d’avoir à venir le chercher. Cet abruti ne sait pas la fermer et t’as horreur de bavarder. De nulle part, une main se balade sur ton fessier, la mâchoire crispée, tu te retiens d’abattre ta main sur sa nuque pour l’aider à monter plus vite. À la place, la portière, derrière lui tu as claqué.

Tu fais le tour du véhicule, visiblement irrité ; et ta clope, tu jettes sur le pavé avant de monter. À peine assis qu’il l’ouvre déjà… le trajet s’annonce long. Pas un regard pour ton passager, tu démarres après avoir bouclé ta ceinture de sécurité. C’est bien une des rares fois où tu appliques les règles de base de conduite. Le moteur ronfle, pourtant la voiture reste stationnée : « Ceinture. » que tu ordonnes avant de débrayer. Au bout de la rue, tu prends à droite et quelques mètres plus loin vous rejoignez la voie rapide sans qu’aucune autre parole n’ait quitté ta bouche.
  

cela fait un bon moment qu'il connait skylar. il sait comment il est et il sait surtout que sa présence l'énerve. pourtant, soonki finit toujours par obtenir ce qu'il veut ; des ébats torrides. l'autre homme ne comprend-il par la supercherie? parfois, il se dit qu'il est tout bonnement idiot. depuis le temps, il devrait savoir que le danger est probablement le plus grand facteur d'excitation possible chez l'acteur. et le chinois respire le danger. pas étonnant qu'il attire l'autre comme un papillon l'est par la lumière. un sourire sur les lèvres, il observe son chauffeur prendre place derrière le volant. son but? l'amener au point de rupture. et il sait que ce ne sera pas très difficile.

soonki boucle docilement sa ceinture, le sourire toujours perché sur ses pulpeuses. il ne dit rien jusqu'à ce qu'ils rejoignent la voie rapide, ses yeux ne quittant pas le reflet de skylar dans le rétroviseur central. "t'as de la chance que je ne sois pas assis devant." un léger gloussement. "ou de la malchance, je sais pas." le silence se fait glacial depuis tout à l'heure, alors que son chauffeur ne daigne même pas le regarder. il a l'habitude, alors il ne s'en formalise pas et le brise sans aucun problème. "peut-être qu'une fellation te rendrait ta superbe bonne humeur habituelle." sentez le sarcasme dans son intonation.

le chinois? être de bonne humeur? c'est tout bonnement impossible. pas avec l'acteur, en tout cas. "je sais que tu ne veux pas parler avec moi - c'est dommage - mais tu peux au moins faire semblant que ce que je dis t'intéresse, non?" les prunelles dérivent enfin sur le décor qui défile à toute vitesse par la fenêtre du véhicule. l'air devient songeur. "aujourd'hui, c'était satisfaisant, tu sais. mais je pense que je ne suis pas pleinement comblé. c'est bizarre, non?" un sourire en coin s'installe. "tu pourrais m'aider à remédier à la situation." bon. d'accord, soonki ne l'aide pas vraiment à simplement faire semblant que ça l'intéresse, puisque chaque phrase est tournée vers le sexe. mais il est ainsi fait et c'est à se demander s'il en a même conscience.