00h20 quand tu sors de l'agence, les yeux explosés et pas l'envie de rentrer. Avec Aël, c'est toujours compliqué, tu lui as bien présenté tes excuses ; mais c'est comme si rien n'avait changé. Il paraît méfiant et de ton côté, c'est comme marcher sur des clous aiguisés :: ( t'as peur, de faire un pas de travers, de te planter ) :: puis comme si ça ne suffisait pas, on te met la pression pour ton prochain ep – celui que tu galères à terminer. Et puisque ça te fais chier, que ça occupes toutes tes pensées, tu ressens le besoin pressant de souffler ; respirer.

Alors tu laisses tes pieds choisir ta destinée, te mener là où tu ne seras pas jugé, ni pressé ; cet endroit que tu considères comme un second chez toi. Quinze minutes plus tard, t'émerges à la sortir du métro, disparaît au coin d'une rue :: ( remontes le masque sur ton nez ) :: avant de pénétrer la supérette ; habitué, zigzaguer entre les rayons – sur les liqueurs, ton choix, s'est arrêté. Armé des deux bouteilles, à la caisse, tu sors ta carte d'identité et continu ton chemin. Insadong peu réveillée, ses rues désertées et ta silhouette qui se faufile dans les allées.

À moins de cent mètres et malgré l'heure tardive, tu n'as pas pris la peine de notifier ton hôte de ton arrivée ; parce que ce n'est pas comme ça que vous fonctionnez. Débarquer à l'improviste semble plus approprié, et puis, s'il n'est pas là... tant pis, devant sa porte tu attendras. Le code du bâtiment n'est plus un secret depuis longtemps :: ( et devant sa porte, tu t'arrêtes ) :: frappe poliment avec le goulot d'une bouteille ; avant de sonner – des fois qu'il soit entrain de bosser, qu'un casque recouvre ses oreilles et l'empêche d'entendre le bruit que tu fais. Et lorsque la porte s'ouvre, le gratifier d'un : « Yo ! » en agitant le whisky et le eristoff black que tu t'es permis d'acheter.

journée chargée, déplaisante. constamment à la bourre. déconcentré par on-ne-sait-quoi. la frustration est palpable et les accords restent coincés dans cette tête qui est la sienne. inspiration toujours fugace lorsqu'il ne peut écrire ce dont il a envie. producteur enchaîné à un genre qui ne lui correspond pas, c'est en colère qu'il a rejoint son appartement chaleureux. petit coin de vie légèrement bordélique, mais tant apprécié. un refuge où les idées s'envolent pour s'épanouir pleinement. aussitôt arrivé, aussitôt affublé d'un joint. coincé entre ses lèvres alors qu'il l'allume et la première bouffée est salvatrice. les muscles qui se détendent enfin même si les effets du cannabis ne sont pas encore installés.

le casque vient rejoindre ses oreilles et l'inspiration déborde. les heures passent sans même pouvoir les compter et c'est la sonnette de la porte d'entrée qui le fait émerger, plusieurs heures plus tard. un coup d'oeil à l'horloge accrochée au mur pour constater l'heure tardive et faire glisser le casque sur ses épaules. ainsi accroché à son cou, il se lève pour aller ouvrir. aucune surprise que d'y voir un yunho aux mains accrochées à des bouteilles de liqueur forte. expression lasse tandis que les prunelles reconnaissent sans mal les étiquettes. "yo." lâché simplement, alors que les doigts s'enroulent autour de la bouteille de whisky pour la lui dérober et le laisser en plan. ce n'est pas comme si c'était la première fois qu'il venait en ce lieu. jaeseong pourrait sans mal le qualifier de coloc, à ce stade.

c'est la petite cuisine qui l'accueille pour en sortir deux verres, dont un qu'il remplit sans attendre de l'alcool doré pour y tremper aussitôt les lèvres. un soulagement palpable, alors qu'il revient au salon pour poser le verre vide et le plein sur la petite table basse. le casque est retiré, puis déposé quelque part, comme à son habitude. un soupir tandis qu'il s'affale contre le dossier du canapé, la tête rejetée vers l'arrière pour y prendre appui, puis la tourner pour observer l'invité. "t'étais à l'agence?" sujet presque tabou et pourtant, bienheureux d'avoir une rentrée d'argent pour au moins survivre. la fatigue a quitté son corps il y a déjà un moment, trop concentré à laissé ses pensées virevolter sous les notes délicieuses.

Dans ta tête, cette mélodie que tu ne parviens pas à terminer ; tourne en boucle comme un vieux disque rayé. La même loop encore et encore en repeat forcé, incapable de trouver un accord pour enchaîné. La vérité, c'est qu'Aël occupe tes pensées :: ( il a dit qu'il était désolé ) :: pourtant il n'a rien dit, n'a plus donné signe de vie lorsque tu es parti. Et si tu ne l'avais pas recroisé, au taff obligé, tout porte à croire qu'il cherche à t''éviter. Peut-être qu'il avait raison, t'as vraiment déconné ; petit jeu innocent d’apparence – tu réalises maintenant qu'il ne l'était pas tant.

Un sourire placardé sous ton nez lorsque la porte s'ouvre sur Jae, et c'est comme si une partie de tes problèmes s'envolaient. Comme un retour à la maison, tu passes le seuil le cœur léger. De la bouteille désirée l'aîné s'est emparé ; tandis que tu choisis le salon pour destination. « T'as une sale tronche, c'était quand la dernière fois que t'as dormis ? » que tu commentes sans délicatesse, alors que ton corps s'effondre sur le canapé. Impatient, tu bois au goulot directement :: ( le pétrole se répand ) :: nappe ta gorge de picotements familiers. Sans doute le brun te fera une réflexion, et tu lui fera remarquer qu''il n'a toujours pas arrêté de fumer.

Et du coin de l'œil, tu l'observes revenir de la cuisine et s'installer au ceux de son nid. Le verre vide su la table te rappelle que la liqueur tu as déjà entamée ; ça étire un coin de tes lèvres, te fait soupirer : « Ouais... » une autre gorgée puisée à la source et les yeux tu as fermé, couvert par ton avant bas, tu te laisses aller : « J'suis qu'une merde- » ricaner « -J'arrive à rien, trois jours que cette foutue ep devrait être terminée ; j'ai toujours pas de lyrics et la mélodie est à chier. » et le goulot retrouve à nouveau le chemin de tes lèvres – tu bois trop, yunho. « Bref ! » tu te redresses, remarque enfin le casque qu'il vient de poser : « Tu bosses sur quoi en ce moment, une dinguerie ? »

il devrait pourtant le savoir, que yunho n'a pas besoin de verre pour son alcool. il la puise directement dans la bouteille. néanmoins, l'habitude est forte lorsqu'un invité rejoint son appartement. même si cet invité-là n'a rien d'ordinaire. les paroles le frappent et le forcent à réfléchir, alors qu'il n'en a pas réellement les capacités en ce moment. et à vrai dire, il ne se souvient plus vraiment de la dernière fois qu'il a trouvé le sommeil à travers les derniers jours. il lance donc un "j'sais pas trop." d'une lassitude évidente à son ami avant de le rejoindre sur le canapé. le voir descendre la liqueur forte à cette vitesse lui donne étrangement envie de fumer. encore. toujours. c'est pour ça qu'il ne pointe pas la consommation du cadet, puisqu'il sait que la sienne n'est pas bien mieux.

confortablement adossé au canapé, jaeseong observe celui qui prend place à ses côtés pour l'écouter parler. léger sourire qui ourle ses lippes. il ne sait que trop bien comment il se sent. il a souvent cette sensation lorsque tout va mal. tout comme aujourd'hui, à vrai dire. n'y tenant plus, le trentaine se redresse le temps d'empoigner son verre pour le terminer d'une traite et aussi pour se dénicher un nouveau joint qui rejoint aussitôt ses pulpeuses. il cherche un infime instant son briquet pour enfin en allumer le joyau. première bouffée bienfaitrice, addiction bien réelle. les doigts en tendent un vers l'invité. "t'en veux un?" pour finalement s'adosser de nouveau au dossier, la tête rejetée vers l'arrière, le joint entre les lèvres et les bras relevés pour reposer sur le dossier et pendre dans le vide à l'arrière. les prunelles détaillent ce plafond terne et lisse pendant que la fumée qu'il produit vient lui brouiller un peu plus cette vision.

nouvelle interrogation lancée et les doigts viennent retirer le joyaux de ses lèvres pour pouvoir prendre la parole correctement. "bof... c'est pas génial, j'ai du mal à pondre quoi que ce soit, en ce moment. j'ai une panne." et malgré qu'il était perdu tout à l'heure, les compositions ne lui venaient pas. il réarrangeait quelques morceaux, en interprétait d'autres, mais rien de nouveau. "un peu comme toi, tout est à chier." se dénigrer n'a jamais été difficile pour l'artiste incompris et le joint retrouve sa bouche pour lui remplir les poumons de fumée. toutefois, autant dire les choses telles qu'elles le sont. son autre main vient frotter son visage avant qu'il ne se redresse et appuie ses coudes sur ses cuisses.

Peu à peu, l'alcool se mêle au sang ; relaxe tes muscles et détend ton esprit. On est encore loin de cet état de plénitude que t’espère atteindre, pour ça, faudrait que la bouteille entière y passe :: ( à moins qu'un joint soit la clé ) :: d'entre tes lèvres glisse un « merci » tandis que de l'herbe tu te saisis. L'incandescence du joint de fascine un court instant, un rictus sous ton nez avant d'en accueillir les premières bouffées salvatrices. Dans les airs, les volutes s'élèvent au même rythme que tes pensées ne s'allègent.

À tes côtés le frère se dénigre encore ; prétendu panne à laquelle tu ne crois pas, parce qu'à tes yeux ses travaux sont de l'or. Alors ton visage penche du côté de l'aîné : « Arrêtes, dis pas n'imp ! J'suis sûre que t'as des dizaines de chef d’œuvres là dedans. » de ton doigt pointer la matière grise qu'abrite sa caboche. Le pousser amicalement, accompagner le geste d'un sourire avant de finalement te redresser. « T'sais quoi ? On devrait le faire à l'ancienne ! » tu décharges la table basse de cette bouteille de whisky qui s'ennuie pour en remplir le verre vide de l'ami.

Un sourire complice et t'en chipes une gorgée direct au goulot ; ça te fait grimacer, mais bordel, ce que s'est bon de sentir tes organes s'embraser. « Quelques verres, autant de joints, de la bonne musique, un poto et l'problème est réglé ! » Sans un mot, t'attrapes le pc qui traînes et dans le moteur de recherche tu saisis deux mots :: ( de quoi vous ambiancez ) :: et peut-être débloquer votre inspiration, qui sait ?! Ton choix se porte sur une drill uk d''apparence stylé, le genre de truc qui dès les premières notes te met dans l'ambiance ; te fait bouger la tête et froncer les sourcils. Puis le morceau se termine, te laisse sur ta faim : « Meh...Un peu fade, à toi. » et le pc rejoint les genoux de son propriétaire.

la musique, c'est toute sa vie. petit génie qu'il est, dont le travail n'est que trop peu apprécié. il a ses moments de vides créatifs, malgré ce que semble penser son ami. il y a des jours où il déprime et n'arrive à rien, comme aujourd'hui. comme hier et la journée d'avant. il n'arrive à rien et ça le frustre. et parce qu'il est frustré, tout ce qu'il crée, ça ne lui plaît pas. alors il ne fait rien, se contente de laisser couler. sauf que c'est particulièrement difficile quand il ne sait rien faire d'autre. il reste parfois des soirées entières à avoir le regard dans le vague, secoué par la lassitude. et probablement une dépression non-diagnostiquée.

yunho tente de le rassurer et ça ne lui arrache qu'un faible sourire. "ouais, mais ils se font la malle, en ce moment." une petite poussée amicale, avant de reporter ce joint à ses lèvres pour le soulager un peu. une protestation se coince dans sa gorge, tandis qu'il laisse son ami lui verser un nouveau verre. à quoi bon s'opposer? il connaît le jeune homme, depuis le temps. ça ne servira à rien de résister. il laisse néanmoins un soupir lui échapper, alors que ses doigts s'enroulent autour du verre pour y tremper ses pulpeuses dans l'alcool fort.

il le laisse se saisir de son pc qui traînait sur la petite table basse et y lancer un morceau. son esprit d'analyse musicale se met immédiatement en fonction. le morceau est, somme toute, assez bien, mais quelque chose manque cruellement. et jaeseong pense savoir ce que c'est. songeur, il écoute attentivement le morceau jusqu'à la fin et hoche la tête au commentaire de son ami. "ouais, il manque un truc." coinçant le joint entre ses lippes, il se saisit du pc pour y faire quelques manipulations avec le morceau choisit par l'autre artiste. il se fiche bien du but de la manoeuvre pour retoucher le morceau avant de finalement le relancer avec ses modifications.

Point de protestations dans le regard las l'aîné ; depuis longtemps, aucune remarque sur tes vilains penchant n'est tolérée. Sans limite, le liquide tapisse ta gorge d'un arrière goût de réglisse. Ô cette excuse tu refuses de l'avaler, te saisis du pc, choisis un son que les enceintes pourront cracher. Sourcils froncés, le prémisses sont timides et la rythmique un peu vide :: ( bancal en somme ) :: l'objet, sur ses genoux est retourné : « À toi de jouer ! » qui sonne volontairement comme un défi.

Il n'a pas l'air de remarquer, Jae, qu'entre ses doigts le morceau s'est déjà métamorphosé. Le beat bien plus précis tranche dans le vif ; s'ajoutent des basses et c'est tout ton être qui vibre. La bouteille d'or noir dans la main, tu la déleste d'un quart de son contenu :: ( secouer la tête ) :: la mélodie s’épaissit à l'image de ton taux d’alcoolémie. Le frère n'a pas fini d'arrangé, que t'es déjà debout à fredonner un refrain éclaté.

Le corps se balance tandis que, ta main, dans le vide, marque les temps. Tel un zombie, tu déambules dans le salon ; possédé par le génie, l'inspiration glisse des mots à ton oreilles. Mots que tu t'empresses de cracher sitôt le son modifié :


Un couplet improvisé sur le tas, qui parle de lui, qui parle de toi. Un sourire amer sous le nez, tu lances un regard vers l'aîné ; lâches un pouce levé avant de noyer tes sentiments muets par une nouvelle gorgée.

la magie s'opère sous ses doigts lorsqu'il reprend possession de son ordinateur. sans même qu'il n'aie à penser. de toute façon, avec les joints et l'alcool, son cerveau ne fonctionne qu'en mode automatique. il n'en perd toutefois pas son talent inné pour la musique. la composition, plus précisément. jouer avec les notes, ça ne l'effraie pas et c'est bien pour ça qu'il en sort des petits chefs-d'oeuvres. des pièces qu'il ne voit pas réellement; trop occupé à tenter de contrer sa lassitude et à se rabaisser. il est comme ça, le trentenaire. toujours à se détériorer.

néanmoins, ce qu'il fait du morceau semble lui plaire autant qu'à yunho qui s'est levé et qui semble partie dans une sorte de transe. le verre arrive jusqu'à ses lèvres afin d'en boire l'alcool cul-sec. le liquide lui brûle la gorge et il grimace en posant son verre sur la table basse. ça fait du bien. sa tête bat la mesure, tout comme sa jambe, preuve qu'il est au moins un peu satisfait de sa manipulation musicale. aussitôt, il coince un nouveau bâton blanc entre ses lèvres. l'addiction étant bien plus forte que lui.

les paroles que jette yunho sont pas mal, jaeseong se fait la réflexion qu'il devrait les prendre en note, mais il ne le fait pas. une petite improvisation qui sera rapidement oubliée et il n'a pas la force de se concentrer pour les apposer sur le papier. "pas mal." commenté de sa voix basse et lasse. il en faut beaucoup pour le sortir de cet état quasi permanent. une nouvelle taffe et un soupir lui échappe. il commence à se sentir un peu mieux, même si quelque part, il sait que c'est dû aux consommations addictives. adossé au canapé, il observe son meilleur ami vagabonder devant lui et l'esquisse d'un sourire lui échappe. "ça, c'était pas à chier..." dit-il, plus pour lui-même que pour yunho. le regard dans le vague, il se perd dans ce qui ressemble à ses pensées sans réellement l'être.

L'alcool glisse le long de ta trachée, finit d'intoxiquer ton esprit déjà bien amôché, mais ce n'est toujours pas assez. Pas assez pour oublier que t'as merdé, qu'à cause de ton comportement de merde, un ami à préférer prendre la fuite. Alors ouais, maintenant, il ne reste plus que les vrais : Nara et Jae. De cette bouteille, tu t'abreuves encore - le but ? La vider.

Le visage levé en direction du plafond, les bras balants, tu fermes les yeux. La bouche s'ouvre, mais rien n'en sort avant un moment : « Nan... Nan, c'était pas à chier- » soupirer « -en revanche tu sais ce qui l'est ? » la tête retombe d'un air dramatique tandis que, du doigt, tu accuses : « L'industrie, la société, les banquiers qui s'en foutent plein les poches sur ton dos alors qu'une pute doit trimer toute la nuit pour quelques billets... »

Loin si loin, et déjà hors de toi, t'en veux à la terre entière. « Tous ces toquards qui vendraient leur mère pour avoir un peu de notoriété, je te jures, je les hais... » sur le sol, tu te laisses tomber pour continuer ce monologue que tu n'as pourtant pas prémédité : « T'sais ce qu'est encore plus à chier ? » Ô ce que t'as l'air misérable à serrer ta bouteille contre ta poitrine, mais ça ne t'empêches pas de faire les questions et les réponses : « L'amour. » parce que ça y est, tu crois avoir capté pourquoi ça fait si mal de voir Aël s'éloigner ; tu l'aimais.