Les heures semblent s'étirer inlassablement, rendant cette journée de plus en plus interminable, éreintante, lassante. Il enchaîne son programme chargé, entre ses cours et ses entraînements à l'agence. Mae Ri, il a choisi ce rythme infernal qui remplit l'espace, ne lui laisse pas de répit, l'empêchant d'être seul avec ses propres démons. L'étudiant ferais tout pour arriver au but qu'il s'est fixé. La journée passe, avec ses humeurs qui semblent jouer avec le temps, dormant, galopant, frémissant. Et le garçon se perd dans ses pas de danse, s'immerge des vibrations de ses cordes vocales, poursuit les notes volantes. Mae court de salle en salle, de cours en cours, jonglant entre son cursus et son club, dans un naturelle si simple, saluant les gens autour de lui avec une politesse dépourvu de sincérité, que des belles paroles qui glissent ici et là, une subtile assurance pour l'avenir de ces visages souvent inconnu. 

Le soir venu, il est épuisé, la journée chargée, mais il est encore si tôt, trop tôt, pour rentrer chez lui... L'orbe doré s'éteint à peine au loin pour laisser la ville s'illuminer de lumière artificielle, et Mae ne veut pas rentrer chez lui. Gaminerie, caprice, qui lui n'aime pourtant pas les gens. Ce qui le fatigue, ce sont les interactions, mais qui ne parfois ne veut juste pas tourner en rond chez lui.

« - Tu es désespérant. » 

Mae roule des yeux, alors que ses mains échouent dans ses poches avec lassitude. Il fuit ce ton si familier, marchant d'un pas décidé, croisant d'autres groupes d'étudiant par-ci par-là, qui peuplent toujours ce lieu jamais vraiment vide, qui pourtant ne veut pas dire être entouré. Le garçon passe presque inaperçue, alors qu'il rejoint les dortoirs où il ne loge pourtant pas. Il espère juste que la seule personne qu'il veut voir ne soit pas encore rentré, c'est tout ce qu'il souhaite. Peut-être a-t-il une bonne étoile aujourd'hui, alors qu'il aperçoit l'objet de sa venue, pressant le pas -sans courir pour autant, l'image compte après tout-, il se glisse entre la porte d'entrée, et la bouille de son ami. Il n'aurait pas vraiment fait attention si celui-ci était accompagné ou non, ce n'était pas sa préoccupation. De toute façon, Mae n'était plus aussi bienveillante pour penser aux autres qui voudraient passer du temps avec Masa.

« - juste à temps, j'ai bien cru que tu rentrerais avant que je te rattrape. Je sais pas si j'ai le droit de rentrer moi... » 

Il se fiche aussi peut être de la politesse, du moins, avec Woo, il ne s'encombre pas autant de mauvaise fois que les courbettes qu'il pourrait faire pour s'ouvrir de potentiel porte. Il rit dans une petite moue, se voulant blagueur, mais ce n'est pas sa spécialité. Il tente. C'est déjà ça, il pense.

« - Je te kidnappe boire un verre. Je t'interdis de dire non. » 

Partenaire du soir trouvé, le seul auquel il est pensé de toute façon, il ne laisse pas vraiment le choix à Masa, le traînant déjà hors du dortoir. Si Woo vivait seul, il aurait juste à débarquer chez lui, c'était plus compliqué de s'imposer dans une chambre de dortoir, sûrement occupé par un colocataire qui n'est pas un chat. Au moins, chez lui, Litchi ne dérangeait personne. À part les superstitieux qui n'aiment pas les chats noirs. Comme si un simple chat pouvait influencer la chance de quiconque... Absurde. Il soupira doucement, une fois éloigné des va-et-vient des étudiants, marchand tranquillement au côté de son meilleur ami, embarquer bien malgré lui. Sortant un paquet de cigarette, Mae en sortie une pour la porter entre ses lippes, l'allumant sans tarder, la première de la journée, un exploit. Inhalant le doux poison, il en rejette la fumée qui s'envole se mêlant aux quelques bourrasques qui passent par moment dans ses cheveux. 

« - Comment tu vas ? »

Ils arrivaient alors au café du quartier étudiant, sans se presser. De toute façon, il devait finir sa barrette de nicotine avant de rentrer, alors qu'elle se consume lentement entre ses doigts. Mae Ri n'était pas pressé. Il était de bonne humeur aujourd'hui, il observa son ami calmement.

« - Je suis désolé si tu avais prévu quelque chose... »

Faux. Il est rare qu'il soit vraiment désolé, mais c'était son ami. Il finit par écraser sa cigarette au sol, souriant innocemment à Masa.

« - On va le boire ce verre alors ? »

“- hm, c’est vrai, tu me connais bien, je serais venu te kidnapper dans ta chambre s’il le fallait.”

Il pouffe de rire légèrement, décidément, son ami le connaissait bien, c’est pas une stupide règle qui allait l’empêchait de faire ce qu’il veut. Il hausse les épaules, il avait juste voulu faire le garçon civilisé qu’il n’est pas, et ça ne l’empêche pas de le traîner avec lui, Masa n’est pas du genre à refuser de toute façon, et Mae Ri est assez intelligent pour ne pas forcer s’il sent que c’est vraiment pas le moment. Mais, les deux marchent tranquillement sous les étoiles, dans une odeur de fumée qui se mélange à la brise de cette soirée. La marche est calme, et les questions sont posées qu’une fois arrivé, dans l’attente que la cigarette soit consumée entièrement.

“- Je vois que je suis venue égayer ta fade journée, tu peux me remercier, je suis là pour embellir ta vie.”

Il essaye la plaisanterie, juste pour que la conversation reste légère, parce qu'il ne veut pas voir son ami déprimé, rare fois que le garçon prête réellement attention aux sentiments des autres, mais c’était Woo après tout. Il hausse les épaules en écrasant sa tige de nicotine au sol.

“- Remplis, mais ça va, je vais pas me plaindre de ce que j’ai choisi.”

Il appréciait son rythme de vie même s’il courait un peu partout pour accomplir tout ce qui est noté dans son emploi du temps. ça lui permet de ne pas trop réfléchir, de ne pas tourner en rond dans ses idées noires, de ne pas entendre le fantôme qui le hante, de rester fixé sur son objectif premier sans dériver.

“- Je suis sur que tu sais déjà combien y en a, même si c’est rare que tu n’es rien de prévu… Enfin c’est une chance pour moi, je n'ai pas eu à te chercher longtemps.”

Ni à devoir l’amadouer pour qu’il vienne avec lui. En ce moment c’était compliqué de se croiser, les emplois du temps étaient chargés, mais ça ne veut pas dire s’éloigner. Mae, il aimait passer du temps avec Masa, même si parfois ça s'embrouille, ça ne dure jamais longtemps, puis le reste du temps, c’était juste simple, c’était calme et reposant. Ils sont rapidement à l’intérieur, c’est plutôt calme en cette fin de journée, et c’est pas plus mal, il n’aime pas beaucoup la foule Mae Ri.

“- Un chocolat chaud, je pense et toi ?”

Il doute que son ami ait fait un choix, il est plus du genre à prendre comme les autres, parfois il se demandait comment il faisait. Après tout, chacun ses goûts, si Masa n’aime pas le choix de son ami s’était plutôt compliqué.

“- C’est intense et je ne vois pas le bout du tunnel, pour l’instant je n’ai pas de date de début, juste quelques événements ici et là…”

Le regard se perd dans le vide un instant, la peur de ne jamais débuter finalement, de voir le rêve s’envoler, le fuir comme la peste, et de retomber dans l’oubli. Mais, les pensées sont vite chassé d’un revers de main, enfouir ses peurs et ses doutes au fond de lui, ne rien laisser paraître, ne pas quitter le chemin vers son but final. Leur tour arrive, et la commande est rapidement passée, les verres dans les mains, il amène son ami sur une table à l’extérieur, posant son verre sur la table, il se laisse tomber sur une chaise avec nonchalance, s’étirant doucement.

“- Sinon, il s’est passé quoi pour que ta journée soit si chiante sans ma précieuse présence ?”

“- Tu ne me laisse pas la chance de paraître être un élève exemplaire, snif.”

Plaisantant encore, si son ami le connaissait trop bien, il ne se gênait pas de faire le comédien face aux autres, ne montrant que ce qu’il souhaite donner comme image en générale. Faisant le chemin vers leur destination, sans trop se presser pour se remplir les poumons de fumé, oubliant peut-être la fraîcheur de ce début de soirée qui aurait pu gêner son ami, mais une façon de faire durée la soirée, pour ne pas rentrer chez lui trop vite, être seul avec lui-même et ses pensées.

“- Je devrais te mettre un traceur, tu ne tiens vraiment pas en place, ou venir te chercher la nuit pour éviter que tu comptes encore tout et n’importe quoi au lieu de dormir.”

Il aurait bien la flemme de compter les lattes de son plafond, heureusement, il y avait Litchi pour lui tenir compagnie et éviter de tourner en rond dans son salon quand il ne sait que faire. Finissant par entrer dans le café, l’heure des commandes est arrivée, il n’avait pas réfléchi à quoi prendre avant ça, choisit quelque chose de simple, quelque chose de chaud.

“- ne t’inquiète pas, je ne bousille pas mon corps, j’en aurais encore besoin après mes débuts, un chanteur qui ne peut plus danser c’est un peu la loose.”

Un fois assis, Mae Ri renvoie la conversation sur son ami, réellement intéressé, il écoute attentivement, en buvant un peu de sa boisson qui vient lui brûler la langue sans qu’il ne bronche vraiment pour autant.

“- Pourquoi tu prends encore ces désirs en compte c’est pas sa vie, puis t’es majeur, dis lui que t’as pas envie d’y aller.”

Il hausse les épaules, il ne comprend pas vraiment, aucune notion d’amour parentale, lui qui à le sang de son père sur les mains, qui a oublié que lui-même n’avait jamais osé s’opposer au sien -ou qu’il refuse d’y réfléchir-.

“- Hum, rien de spécial, j’entends quelques projets de mon agence, mais je sais pas si ça va se faire… Sinon comme on dit, métro boulot dodo.”

Il boit et passe une main dans ses cheveux, l’air pensif avant de reprendre.

“- Il se pourrait que je puisse aller une semaine aux État-unis pour quelques cours de danse, je sais pas si ça va se faire, ni si j’accepterais.”

Jouant avec sa tasse, à faire valser le liquide, il cherche ses mots.

“- J’ai jamais pris l’avion, ça me fait un peu flipper.”

Il rit doucement, dans un élan d’autodérision, cacher la gêne de cette aveux qu’il trouve stupide.

“- Mais refuser, ça voudrait dire que je suis pas motivé j’imagine.”

haussement d’épaule, comme si ça l’importait peu, alors que les doutes l'accablent de plus en plus souvent, même s’il se bouche les oreilles pour ne pas les écouter, les remettre à plus tard.

Il rit, Mae Ri, en se disant qu’il devrait peut-être le faire, avec son ami qui ne tient pas en place, toujours aux quatre coins de la ville. Enfin, Masa devait avoir plus d'amis que lui à aller voir donc c’était sûrement logique qu’il bouge beaucoup dans des sorties ici et là. Il chasse l’idée d’un revers de main alors.

“- ça serait pas très légal tout ça… je te harcelerai d’appel jusqu'à ce que tu daignes te rappeler de son existence… à moins que tu filtres mes appels”

Puis assis devant son verre ils divaguent sur des sujets, sur leur vie, et Mae, il comprend pas cette intérêt à plaire au paternel. Il ne connaît pas vraiment l’amour d’une famille, il déteste son père, ne se souvient même plus de l’époque où il aurait possiblement aimé le sien. Il a des souvenirs que de la peur qu’il inspirait, que le dégoût et la haine, il ne sait plus quand exactement il s’est mis à détester son paternel, reni son sang dans le sien, envie de brûler tous ces souvenirs, mais les reliefs de sa peau lui rappelle sans cesse d’où il vient.

“- Il a qu’à en faire de la natation, t’sais t’as pas besoin d’un père, il finira par partir avant toi façon.”

Il hausse les épaules, le garçon, il n’est pas d’un grand secours question famille, il n’en a plus, a-t-il considéré en avoir une depuis qu’il comprend le monde ? Il sait déjà qu’il finira seul, et c’est peut-être pour ça qu’il veut se noyer dans la musique, juste lui et les rythmes entraînant, loin des gens et leur complexité.

“- Beaucoup ouais… J’aimerais juste débuter quand même.”

Les projets c’est bien, mais ça ne fait pas tout. Un soupir, il parle des USA, se demande s’il va y aller ou non, si volait dans un avion serait vraiment sécuritaire. Dans quel coin ? Il avait entendu des noms, il lui faut quelque minutes pour se rappeler de lieux, parce qu’il n’est pas très bon en géographie le garçon.

“- Miami apparemment, après ça peut changer encore, y a la réunion en fin de semaine.”

Il se pince le nez avant de boire un peu, pouffant dans une réflexion qui se fait à soi-même, lorsqu’il s’imagine là-bas.

“- Je vais avoir l’air fin avec mon angais approximatif…”

Il n'est pas doué en langue, parce que c’est compliqué, et ça l’ennuie. Il a pas fait d’effort dans ce domaine le gamin, mais il va devoir si mettre.

“- Mouais… Mais bon ici je peux le faire quand je veux, c’est pas tous les jours les states… Peut-être que j’irais, juste histoire de dire que j’ai vu un peu de l’amérique, au cas où ma carrière flop avant les world tour.”

Il ne veut pas penser que tout s’effondre, mais s’il cache son pessimisme d’ordinaire, parfois ça revient en surface, effleure ses lèvres, découvre ses craintes, sous forme de plaisanterie.

“- Qui va nourrir Litchi si je suis pas là ?”

Est-ce qu’il s’inquiète pour le chat de goutière qui squatte chez lui ? Un peu, il aime bien le chat noir qui lui tiens compagnie.

“- Tu pourras lui apporter du pâté deux à trois fois par semaine ? Si tu le fais je pars aux etats unis m’entrainer et après je deviendrais ton meilleur pote superstar.”